Intervention de Jean-Claude Mathis

Séance en hémicycle du 17 octobre 2012 à 15h00
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017 - projet de loi de finances pour 2013

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Claude Mathis :

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, chers collègues, élaborer un budget est toujours un acte politique majeur, porteur de choix forts en matière de dépenses et de fiscalité.

Si, pour préserver notre souveraineté financière et respecter nos engagements européens, tout le monde s'accorde sur l'objectif d'un retour à 3 % des déficits publics, les mesures prises par le Gouvernement pour y parvenir ne paraissent pas des plus appropriées.

En effet, ce projet de loi de finances pour 2013 n'apporte aucune réponse structurelle aux faiblesses de notre économie, qu'il s'agisse de la réduction de la dépense publique ou de l'amélioration de la compétitivité de nos entreprises. Au contraire, les choix faits par le Gouvernement sont de nature à faire chuter les investissements des entreprises et la consommation des ménages, ce qui risque d'être totalement destructeur pour notre économie.

Première constatation : le budget établi par le Gouvernement repose sur une hypothèse de croissance de 0,8 % en 2013. Or le consensus des économistes se situe plutôt autour de 0,4 %, certains évoquant même une croissance quasiment nulle. Pour tenir l'objectif d'un déficit à 3 % du PIB, la Cour des comptes estime à 44 milliards d'euros l'effort à fournir si le PIB est stagnant. Ce budget 2013 risque donc d'être insuffisant avant quelques mois.

Deuxième constatation : le Gouvernement a prévu un effort supplémentaire de 30 milliards d'euros, qui s'ajoutent aux quelque 6 milliards de hausses d'impôts déjà votées en juillet dans le budget rectificatif 2012 et aux 2,5 milliards d'économies annoncées pour l'assurance maladie, soit environ 40 milliards. Globalement, entre 2011 et 2013, cela portera à une soixantaine de milliards les augmentations de prélèvements en France. Le taux des prélèvements obligatoires va ainsi grimper de 45 % en 2012 à 46,2 % en 2013.

Cet effort reposera pour deux tiers sur une augmentation des prélèvements obligatoires – 10 milliards pour les ménages, 10 milliards pour les entreprises – et pour seulement un tiers – 10 milliards également – sur une réduction de la dépense publique. C'est le contraire de ce que préconisait la Cour des comptes en juillet dernier.

Concernant l'augmentation des prélèvements obligatoires, le Gouvernement martèle que ce budget est « juste », qu'il épargne les ménages modestes, les petites entreprises, et frappe en priorité les ménages aisés et les grandes entreprises. En effet, on peut estimer que les plus aisés supporteront les trois quarts des hausses d'impôts sur les ménages prévues l'an prochain. À une exception près, et de taille : le gel du barème de l'impôt sur le revenu, qui est en fait une hausse générale de l'impôt. Un système de décote va épargner les vingt millions de foyers les plus modestes, mais les seize millions restants, dont une partie des classes moyennes, subiront une augmentation significative de leurs impôts.

Concernant la prétendue baisse des dépenses de l'État, quels sacrifices le Gouvernement consent-il en échange de ceux qu'il demande aux autres ? Il annonce 10 milliards d'économies, qui consistent non pas à réduire la dépense, mais à ne pas dépenser plus que l'an dernier. La participation à l'effort national est, vous en conviendrez, toute relative. À titre de comparaison, le PLF 2012 avait marqué une rupture en engageant une diminution stricte de 250 millions d'euros des dépenses du budget général.

Ce projet de budget est de la poudre aux yeux qui cache des mesures à court terme sans réelle vision politique. On se demande par exemple en quoi l'augmentation de plusieurs milliers du nombre de fonctionnaires prévue en 2013 participe au redressement de notre pays, que l'on estime plutôt suradministré que le contraire.

En effet, aucune mesure de fond n'est mise en oeuvre en matière de réduction de la dépense publique ou d'amélioration de la compétitivité de nos entreprises. Pire, le niveau record des prélèvements obligatoires est de nature à avoir des effets désastreux en termes de financement de nos entreprises, de délocalisation des capitaux mais également de pouvoir d'achat des classes moyennes.

Il faut vraiment avoir la foi d'un charbonnier de gauche pour se persuader que le budget 2013 est « porteur de redressement » : avec un choc fiscal inédit et un plan d'économies très insuffisant, cela est absolument irréaliste. Qui peut croire qu'un pays supportant un taux de prélèvements obligatoires de plus de 46 % et une dépense publique égale à 56 % du PIB, battant ainsi tous les records européens, est en mesure de retrouver le chemin de la croissance !

Avec 27 milliards supplémentaires prélevés sur les particuliers et les entreprises, la machine s'emballe ! Avec des recettes d'impôt sur le revenu en augmentation de 23 % et une taxation accrue de l'épargne, vous ne ferez pas croire aux ménages que seuls 10 % des Français seront concernés.

Quant aux entreprises, qui souffrent d'un manque cruel de compétitivité, elles devront supporter 10 milliards d'euros de taxes supplémentaires. On a déjà connu plus subtil pour soutenir l'investissement, la croissance et l'emploi…

Mes chers collègues, comme le disait si justement Michel Audiard, « le jour est proche où nous n'aurons plus que l'impôt sur les os » ! En fait, grâce au socialisme, il n'y aura bientôt plus que deux partis en France : ceux qui vivent de l'impôt et ceux qui en meurent. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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