Intervention de Valérie Rabault

Séance en hémicycle du 16 octobre 2012 à 21h30
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017 — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaValérie Rabault :

Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, ce budget, c'est la première marche pour faire repartir notre pays. C'est d'abord retrouver un souffle et dégager de la marge de manoeuvre. C'est arrêter l'hypocrisie qui consiste à financer des baisses d'impôt par de la dette, hypocrisie qui a consisté à faire payer à la nation entière les baisses d'impôt qui ont bénéficié aux plus privilégiés

C'est aussi redonner de la crédibilité à notre politique budgétaire. Sincèrement, mes chers collègues, qui peut croire qu'avec 51 milliards d'euros d'intérêts payés par an, on peut durablement avoir une politique budgétaire crédible ? Cinquante et un milliards d'euros, c'est comme si chaque Français déboursait chaque année 850 euros uniquement pour payer des intérêts à ceux qui prêtent de l'argent à la France. J'ai bien dit 850 euros – on avoisine ainsi trois-quarts d'un SMIC net mensuel.

Ce budget, c'est redonner de la crédibilité à notre pays. Un pays qui maîtrise sa dette est un pays qui peut maîtriser son destin. Un pays qui renonce à la contrôler entre dans une logique de cavalerie. Or, tôt ou tard, nous sommes rattrapés par la réalité et il faut payer.

Ce budget permet pour la première fois de franchir un grand pas : faire converger la taxation des revenus du capital et ceux du travail. Cela traduit aussi une nouvelle vision de ce que doit être la fiscalité juste. Peut-on continuer à envisager qu'un cadre moyen qui gagne 2 500 euros par mois voie ses revenus taxés, pour la partie supérieure, à 30 %, alors même que ceux qui dégagent une plus-value de la vente d'un portefeuille d'actions doivent payer une taxe de 19 % ? Peut-on continuer à avoir des TPE qui paient 30 % d'impôts sur les sociétés quand les plus grandes entreprises n'en acquittent que 8 % ?

Il ne s'agit pas là de « taper » sur qui que ce soit. Il s'agit de rendre à l'impôt sa justice, celle qui aurait dû être la sienne depuis toujours. Car, au fil des ans, la France semble tout de même cultiver un certain goût pour l'exception. Même aux États-Unis, les plus grandes sociétés acquittent en moyenne un impôt de 18,5 % quand le taux marginal est de 35 %. Vous le voyez, nous sommes largement au-dessus des 8 % payés par les plus grandes entreprises françaises. Il nous reste donc une certaine marge de manoeuvre pour faire converger les fiscalités et pour travailler à une fiscalité plus juste.

Sur les plus-values, nous avons aussi entendu beaucoup de choses ces derniers temps. Je remercie notre collègue Pierre-Alain Muet d'avoir rétabli la vérité des chiffres en ce qui concerne la cession d'actions d'entreprises : 57 000 gagnants contre potentiellement 75 000 perdants. Je tiens à rappeler quelques vérités sur la taxation des plus-values. Un dirigeant actionnaire qui vend ses parts, au moment de partir à la retraite, ne paie rien, il est exonéré de la taxation des plus-values. Un créateur d'entreprise innovante, quand il cède ses parts, ne paie lui non plus rien sur la plus-value. Les créateurs qui vendent leurs parts et qui en réinvestissent 80 % se voient eux aussi exonérés d'imposition sur les plus-values. Enfin, si nous nous comparons à nos voisins allemands – je sais que nos collègues de l'opposition aiment beaucoup cette comparaison –, la part du capital-investissement et la part du capital-risque dans le PIB sont deux fois supérieures en France. Ce qui semble bien montrer que la fiscalité des plus-values, même avec les mesures que nous proposons et avec le maintien de nombreuses exceptions, bénéficie bien plus aux Français qu'aux Allemands.

Je sais le Gouvernement attentif et ouvert à la discussion sur des cas qui pourraient être plus délicats ou plus litigieux au regard d'une fiscalité qui aurait pénalisé la prise de risque. Mais ceci ne saurait remettre en cause l'inspiration de cette justice fiscale.

Pour finir, ce budget s'attache à réparer des injustices. Vous avez évoqué, chers collègues de l'opposition, le gel des barèmes concernant les premières tranches de l'imposition sur le revenu. Une décote permettra de corriger cette situation.

Chers collègues de l'opposition, ne vous trompez pas de combat. Un pays qui s'enfonce du fait de ses finances publiques, finit par tuer ses propres entreprises, donc ses emplois. On peut bien sûr toujours vouloir être meilleur que d'autres, s'arranger pour maximiser son avantage fiscal, mais au bout du compte, on ne peut être bon tout seul.

Pour paraphraser l'un de nos anciens brillants collègues, pour qui : « le propre de la démocratie est d'être volontaire. », je vous dirai, monsieur le ministre, que le propre de la fiscalité est d'être volontaire. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)

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