Intervention de Yann-Hervé de Roeck

Réunion du 3 octobre 2012 à 9h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Yann-Hervé de Roeck, directeur général de France énergies marines :

L'une des questions posées portait sur les hydroliennes en Garonne. Nous nous intéressons à la fois à l'éolien marin et estuarien. Un site d'essais a été créé pour les hydroliennes estuariennes et pour des prototypes de petite taille en hydrolien marin, qui se mettent place au pied du Pont de pierre de Bordeaux.

Il faut aussi créer des sites pilotes. Je précise qu'il y a une différence entre les sites d'essais et les sites pilotes : un site d'essais est une infrastructure ouverte à des développeurs pour tester et valider des prototypes ; un site pilote permet à un consortium ou à un développeur de faire la démonstration d'une technologie donnée – c'est donc un système moins ouvert.

S'agissant de l'éolien en mer, les chiffres de 280 euros le mégawattheure sont les bons. Mais comme pour l'éolien terrestre, ils sont amenés à baisser. Nous n'en sommes qu'à la première implantation en France d'éoliennes en mer. À titre de comparaison, la première éolienne marine a été implantée il y a vingt-deux ans au Danemark, époque où la première machine terrestre a été installée en France. Il y a donc des marges.

Mais surtout, l'intérêt de l'éolien en mer est qu'il permet d'installer des éoliennes de très forte puissance : loin des côtes, on peut envisager 8 à 10 mégawatts par machine avec des envergures spectaculaires soulevant peu de conflits d'usage. En outre, l'économie d'échelle réalisée permettra de faire baisser les coûts.

La maintenance en mer génère des emplois. Toutefois, comme l'a fait remarquer l'un d'entre vous, les réglementations marine et terrestre s'ajoutent, sans oublier celles liées au milieu marin. Il y a des efforts à faire ; je pense au déploiement du réseau par RTE.

Je n'ai pas connaissance d'initiative franco-espagnole ou franco-portugaise dans le golfe de Gascogne. Malgré tout, les Français et les Portugais sont très portés sur l'éolien flottant. C'est aussi le cas des Norvégiens, qui ont fabriqué le premier prototype : il fonctionne sur leur réseau depuis deux ans et nous avons participé techniquement à sa mise en place. L'éolien flottant – davantage d'ailleurs que l'éolien en mer posé – a donc un potentiel, et il faudrait sans doute passer des accords, tant du côté atlantique que du côté méditerranéen. Je pense aux projets d'éolien flottant en Catalogne et au projet Vertiwind d'éoliennes à axe vertical, particulièrement adaptées à la Méditerranée où le fond descend assez vite.

S'agissant de la construction de navires pour la maintenance et l'installation, il existe effectivement un très gros marché. Les groupes français sont déjà à l'affût des développements prévus, en particulier au Royaume-Uni, pour l'installation et la maintenance de plus d'une dizaine de gigawatts – c'est-à-dire deux fois plus ambitieux que le projet français sur l'éolien en mer posé.

L'un de vous a évoqué la cohabitation avec les aires marines protégées. À l'occasion des premières discussions que nous avons eues avec l'Agence, j'ai constaté qu'il n'y avait pas d'exclusion systématique des systèmes de récupération d'énergie marine. Ce sont des lieux de dialogue, tout particulièrement avec les milieux de la pêche. Au reste, la concertation est permanente. Lundi, dans le cadre d'une réunion du Comité national des pêches, nous avons prévu l'intervention des comités départementaux et régionaux pour chacun des sites d'essais mis en place par France énergie marine.

Les énergies marines, tout comme l'industrie navale, constituent une chance pour nos ports. Ceux-ci se sont rapidement mis en concurrence, alors que cela n'a pas lieu d'être : ne serait-ce qu'avec le projet des 3 gigawatts pour l'éolien en mer posé, il y a largement de quoi occuper l'ensemble des grands ports de la façade atlantique. Je remarque également que la France a un avantage par rapport au Royaume-Uni : ses systèmes portuaires sont publics et ont des capacités d'expansion supérieures.

S'agissant de la construction des réseaux câblés, elle représente un potentiel économique très important.

Avons-nous pris du retard ? D'autres pays que la France ont mis en place des sites d'essais. Les plus avancés sont très clairement les Britanniques, avec l'EMEC – l'European Marine Energy Center. Néanmoins celui-ci est situé dans les îles Orcades, où les conditions océaniques et météorologiques sont assez rudes. Il est clairement opportun de développer d'autres sites d'essais, notamment en France, ne serait-ce que parce qu'ils favorisent l'implantation des PME à leur proximité. Quant aux zones pilotes, elles sont bien plus nombreuses que les cinq ou six sites d'essais. Il y en a déjà plus d'une dizaine en France, en comptabilisant les zones pour le houlomoteur et l'hydrolien de petite capacité.

L'outre-mer représente un extraordinaire potentiel. Le Plan Réunion 2030-GERRI nous permet d'avancer dans tous les domaines des énergies renouvelables. Je citerai plus particulièrement l'utilisation directe de l'eau froide pour la climatisation, qui se développe à La Réunion et en Polynésie.

Cela m'amène à parler des schémas régionaux. France énergie marine est implantée en Bretagne, région qui dispose d'un schéma régional, le Triskell, destiné à remédier à sa position de péninsule « sous-énergétique ». En revanche, cette région a des objectifs en matière d'énergies renouvelables très ambitieux et fixés dans le schéma.

Les coûts des énergies marines sont les plus élevés de ceux que l'on a évoqués aujourd'hui. La recherche et l'innovation sont donc une nécessité. Sur les dix IEED (instituts d'excellence en matière d'énergies décarbonées) existants, trois sont dédiés aux énergies renouvelables dont un aux énergies marines. S'y sont associés, dans le cadre du partenariat public-privé, des établissements de recherche et de formation – l'IFREMER, l'IFP Énergies nouvelles, le CEAEA – EA pour énergies alternatives – pour les questions de stockage de l'énergie, le CNRS ; des écoles – Centrale Nantes, ENST Bretagne, etc. – et des universités telle celle de Bretagne occidentale. Il y a là tout un potentiel prêt à travailler dans une unité public-privé parce que c'est le meilleur moyen d'avancer très rapidement.

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