Intervention de Jean-Louis Roumegas

Séance en hémicycle du 9 octobre 2012 à 15h00
Création des emplois d'avenir — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Louis Roumegas :

Monsieur le président, messieurs les ministres, madame la présidente de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la loi sur les emplois d'avenir que nous avons eu l'honneur d'examiner en urgence, mais dans le respect du débat contradictoire, est le fruit d'une volonté politique forte, qui ne recule pas devant le tableau accablant de précarité et d'exclusion qui lamine notre jeunesse. C'est aussi l'expression d'une volonté de changer de cap, de construire un avenir où nos jeunes concitoyens et concitoyennes pourront retrouver leur dignité et s'épanouir.

Nous le savons, nous le déplorons : dans notre pays, 23 % des jeunes de seize à vingt-quatre ans subissent la déqualification, voire la relégation, et les formules incantatoires du « travailler plus pour gagner plus », qui ont fait long feu. Nous connaissons le coût de ces partis pris idéologiques : délitement du socle éducatif, pourtant nécessaire à l'accomplissement de la citoyenneté, suppression des services de base et de proximité, affaiblissement du lien social. Les incivilités et les violences se sont décuplées, au rythme des humiliations et des licenciements boursiers.

Nous avons vu à l'oeuvre la privatisation des missions régaliennes d'accompagnement des demandeurs d'emploi, le dénigrement et la casse du vaste réseau associatif voué à la jeunesse, à l'action culturelle et à l'éducation populaire, dont les ressources, lors de la précédente législature, ont été grevées de 40 à 50 %.

Sur ce champ de ruines, nous avons la responsabilité de reconstruire et de réparer. Nous autres, écologistes, sommes pour la réhabilitation de l'action publique en général, et en faveur des plus démunis en priorité : c'est l'un des piliers du développement durable que nous voulons conforter, et que le premier ministre a lui-même appelé de ses voeux lors de la conférence environnementale.

C'est à une véritable mutation culturelle que nous sommes appelés. Si elle s'impose à nous, elle dessine aussi des perspectives engageantes, qu'il s'agisse des créations d'emplois liés à la préservation de l'environnement, aux services à la personne et à son bien-être, des chiffres impressionnants des activités créées dans nos territoires par le biais de l'économie sociale et solidaire, de la relocalisation de nos activités agricoles et alimentaires à travers des circuits courts, ou encore des chantiers de réhabilitation et de sécurisation de nos bâtiments et de nos logements, existants ou à venir.

Toutes ces pistes d'activité doivent inspirer les dispositifs d'accompagnement de nos jeunes, en vue de leur insertion professionnelle et de leur formation. Reste que nous devons tirer les leçons des erreurs du passé et améliorer qualitativement la définition des parcours de formation. En 1981, le gouvernement Mauroy a fait des efforts substantiels pour créer un vaste dispositif de formation des jeunes et favoriser leur insertion professionnelle : la France s'était alors dotée d'une ingénierie de formation et d'expertise remarquable. Malheureusement, dans les années suivantes, les effets d'aubaine, combinés à l'urgence, ont provoqué un délitement du système, qui nous a portés inexorablement vers des stages parking. Ce fut pour beaucoup un retour à la case départ, associé à un sentiment d'abandon, mais aussi à celui d'avoir gâché ou perdu son temps, sans parler du sentiment de dévalorisation, qui obère toute chance de rebondir.

Les écologistes, soucieux du droit à une formation de qualité, ont rappelé, avec de nombreux autres parlementaires, la nécessaire reconnaissance de la validation des acquis, la nécessité d'une réelle formation et la possibilité de présentation à des concours. L'appel à la mobilisation que vous lancez, messieurs les ministres, ne pourra s'exonérer d'une refonte des dispositifs de formation, multiples et souvent mal identifiés, ni de la recherche d'un dialogue convergent entre l'État et les collectivités locales. Nous soutenons une plus grande prise en compte des territoires, de leurs diversités, de leurs particularités, et aussi de leurs inégalités.

Enfin, la création à venir de six mille emplois d'avenir professeur offre l'opportunité de revivifier le secteur éducatif, qui a été saigné à blanc par les vagues successives de restrictions et par la réforme erronée de la masterisation, l'ensemble ayant abouti à un recrutement refermé sur lui-même et socialement sélectif.

Nous nous mettons aujourd'hui en situation de stimuler les vocations, en particulier dans les milieux les moins favorisés ; encore faut-il veiller à ce que cette disposition ne gèle pas la nécessaire réforme de la formation des enseignants et le soutien aux IUFM.

Croyez bien, messieurs les ministres, que le groupe écologiste de l'Assemblée nationale souhaite le succès de cette initiative gouvernementale. C'est avec vigilance que nous suivrons sa mise en oeuvre et son évaluation : 150 000 jeunes au rendez-vous à l'échéance de 2014, c'est un pari audacieux en ces temps de crise, et c'est un pari juste, auquel nous nous associons. (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste.)

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