Intervention de Aurélie Filippetti

Séance en hémicycle du 24 juillet 2013 à 15h00
Indépendance de l'audiovisuel public — Présentation commune

Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication :

Avec cette nouvelle procédure de nomination des membres du collège du CSA, le rôle du Parlement, si essentiel à notre démocratie, se trouve considérablement renforcé. Cette avancée majeure est sans précédent. Ce mécanisme, inédit dans les institutions de la Ve République, est la marque d’une démocratie moderne où majorité et opposition peuvent, et même doivent, en toute transparence, assumer devant le peuple le fait qu’en matière de choix des personnes garantes de l’indépendance de l’audiovisuel, la main ne saurait trembler. Dépasser les clivages partisans, choisir des personnalités fortes et compétentes, c’est cela aussi le signe d’une démocratie mature.

Les membres du CSA ainsi choisis gagneront une force et une légitimité considérables qui rejailliront sur l’institution elle-même et permettront ainsi de moderniser dans un second temps les compétences et le champ d’attribution du futur CSA.

Troisième principe enfin, l’impartialité, parce que le projet de loi réforme la procédure de sanction applicable devant le CSA afin de la mettre en conformité avec les exigences applicables aux autorités administratives prononçant des sanctions telles qu’elles résultent de la jurisprudence constitutionnelle et européenne.

L’instauration d’un rapporteur indépendant du collège du CSA répond à cet impératif. Le déroulement de la procédure de sanction du CSA opérera désormais une séparation claire entre, d’une part, le titulaire des fonctions de poursuite et d’instruction, qui sont confiées au rapporteur et, d’autre part, le titulaire de la fonction de prononcé de la sanction, qui reste confiée au collège du CSA.

Les amendements votés en commission et auxquels le Gouvernement s’est montré favorable ont apporté des garanties additionnelles d’impartialité de la régulation. J’en remercie particulièrement M. le rapporteur.

Vous avez souhaité, monsieur le rapporteur, que soit posé un critère de compétence professionnelle, comme pour d’autres autorités indépendantes, et le Gouvernement y a souscrit.

Vous avez également noté qu’il convenait de préciser l’étendue du devoir de réserve contenu dans la loi, afin que celui-ci fût mieux respecté, et il nous a semblé que cela était effectivement important dans le domaine des médias où la parole est parfois plus spontanée et toujours plus sensible que dans d’autres secteurs.

Vous avez également souhaité que soit précisé le régime des incompatibilités prévues dans la loi, en rassemblant un large consensus autour de votre proposition.

Vos amendements visaient également à ce que le CSA effectue des études d’impact économique avant d’attribuer les fréquences disponibles, ce qui ne peut que rendre plus cohérent leur partage et, partant, l’exercice de la liberté de communication.

Cette loi est un socle qui va permettre, en renforçant la légitimité et l’indépendance à la fois des présidents de l’audiovisuel public et du CSA, de bâtir désormais un audiovisuel tourné vers l’avenir.

L’indépendance, nous la voulions tout de suite, maintenant, parce qu’elle est à la base de toute autre réforme possible de l’audiovisuel.

J’ai eu l’occasion, devant vous et aux Assises de l’audiovisuel, d’engager le travail de concertation nécessaire pour poursuivre l’adaptation du cadre juridique de la régulation audiovisuelle aux mutations profondes de ce secteur, liées notamment à l’essor des terminaux connectés à internet.

Les débats des Assises ont permis de constater un besoin de réforme globalement partagé, d’identifier les mesures envisageables et d’enclencher les expertises et les concertations nécessaires. Des Assises de la radio se tiendront fin octobre dans la même optique.

Ce n’est qu’après ces échanges nourris avec les professionnels de l’ensemble du secteur, selon la méthode de concertation propre à ce Gouvernement, que nous pourrons examiner ce qu’il conviendra de faire en termes de régulation des contenus audiovisuels sur internet, de soutien à la création sur tous les supports de diffusion, ou encore d’organisation du partage de l’espace hertzien entre la télévision et la téléphonie mobile par exemple.

Nous avons choisi aujourd’hui de présenter un projet de loi très fort sur l’indépendance de l’audiovisuel, car elle est le socle sur lequel fonder la régulation des médias dans une grande démocratie. L’audiovisuel est à l’image d’une société. Il en révèle les failles, les faiblesses et les évolutions. Cette réforme va permettre, pour la première fois, de créer autour de la question de l’indépendance un climat de confiance et de responsabilité partagée entre majorité et opposition. Le seul but est de garantir l’indépendance de l’audiovisuel public et de l’instance chargée de la faire respecter, le CSA.

Je souhaite que ce texte soit l’occasion de faire mûrir nos institutions, de les faire évoluer, de faire justice à ceux qui, pendant quatre années, ont souffert d’un soupçon qui entachait leur mandat et l’exercice de leurs fonctions.

Pour terminer, je veux saluer les équipes de l’audiovisuel public, qui mènent un travail difficile, délicat, mais ô combien indispensable. À l’heure d’internet, à l’heure de la délinéarisation, des informations en flux continu, à l’heure où, parfois, nos concitoyens sont soumis à des images et à des informations venues d’autres canaux, qui ne sont ni sourcées ni éditorialisées ni vérifiées, il est plus que jamais nécessaire de défendre une conception exigeante de l’audiovisuel qui corresponde à la haute image que nous nous faisons de la démocratie française.

C’est par cette loi que nous devons commencer, parce qu’elle est la condition première de la liberté d’expression. Elle la protège et la préserve. Souvenons-nous, toujours avec Victor Hugo, qu’ « aucun des soupiraux par où s’échappe la liberté de l’intelligence ne peut être fermé sans péril. » (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.)

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