Intervention de Frédéric Cuvillier

Réunion du 11 juillet 2012 à 16h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche :

C'est avec plaisir que je me retrouve aujourd'hui devant vous, mesdames et messieurs les députés. Je vous félicite pour votre élection et, surtout, pour votre participation aux travaux de cette commission qui m'est chère puisque j'y ai longtemps siégé.

Je souhaite que le travail parlementaire dans le domaine des transports soit au coeur de notre politique. Je sais combien les problèmes auxquels nous sommes confrontés ont en l'occurrence suscité enthousiasme, fébrilité, attentes profondes. C'est ensemble que nous devrons y répondre ! Cela me semble d'autant plus important que, comme l'a rappelé Mme la ministre, de nombreuses annonces ont été faites ces derniers mois et ces dernières années, notamment dans le cadre du Grenelle de l'environnement. Par exemple, la France s'était engagée à diminuer les émissions de gaz à effet de serre de 20 % d'ici à 2020 : nous en sommes fort loin.

La politique des transports doit s'inscrire dans une démarche environnementale. Or le report modal n'a pas été effectif, puisque le transport routier représente aujourd'hui plus de 83,4 % de l'ensemble des transports de marchandises, le ferroviaire 9,4 % – quand le Grenelle tendait à porter la part du trafic de fret ferroviaire à plus de 25 % – et le fluvial 2,2 % seulement. Les assises du ferroviaire, auxquelles nombre d'entre vous ont participé, ont eu lieu au second semestre de 2011. Chacun avait alors constaté l'échec de la politique menée. Aujourd'hui, le secteur ferroviaire est à bout de souffle : la dette de Réseau ferré de France (RFF), qui est très élevée, pourrait croître au rythme de 1 à 2 milliards d'euros par an, jusqu'à atteindre 55 milliards en 2025. De plus, le réseau ferroviaire est vétuste, dégradé, incapable d'absorber une croissance en volume et de répondre aux attentes des territoires. Pire : les incidents se succèdent et sont, hélas, inévitables compte tenu du retard qui a été pris en matière d'entretien et d'investissement.

Le SNIT est également au coeur de nos préoccupations. Là encore, de nombreuses annonces ont été faites par nos prédécesseurs – un véritable inventaire à la Prévert des infrastructures indispensables d'ici à 2020-2025 – sans que les financements aient été au rendez-vous. À ce jour, nous comptons ainsi 245 milliards d'euros de projets non financés alors que la capacité annuelle de financement de l'AFITF s'élève à environ 2 milliards par an. J'évoquerai quant à moi un certain nombre de projets : la ligne LGV dans la région PACA – 16 milliards –, la ligne Paris-Normandie – 7 à 9 milliards –, la liaison Lyon-Turin – 13 milliards –, le canal Seine-Nord Europe – 4 milliards –, la traversée centrale des Pyrénées – 5 à 10 milliards.

Nous nous emploierons également à apaiser les relations avec les collectivités locales tant les relations contractuelles qu'elles ont nouées ne correspondent hélas plus aux enjeux liés aux transports. De surcroît, les dernières mesures qui ont été prises ne vont pas dans le sens de la simplification, bien au contraire.

Le Président de la République s'est engagé à faire des transports un instrument de lutte contre la fracture territoriale afin que nombre de nos concitoyens ne se sentent plus exclus de l'emploi et que les transports deviennent un élément de croissance, d'aménagement du territoire et d'équilibre. Comme le précise le vingt-huitième engagement qu'il a pris, nous veillerons à ce que la qualité de service soit effective, notamment en Île-de-France et dans les territoires les plus enclavés. Telle est la feuille de route que respecterons.

Dès la rentrée, nous donnerons les grandes orientations politiques qui guideront notre action dans le domaine des transports à partir d'un certain nombre de principes : priorité à la remise à niveau et à la modernisation du réseau existant, amélioration de la qualité de service des transports au quotidien ainsi que de la desserte des territoires, moyens de financement des travaux.

L'acte III de la décentralisation comprendra également une feuille de route concernant les transports et les relations contractuelles – ou non – relatives aux compétences reconnues aux différentes collectivités territoriales, ainsi que les modes de répartition des financements croisés qui, s'ils ont été critiqués sous la précédente législature, n'en demeurent pas moins au coeur de l'investissement public.

Nous engagerons aussi la réforme du secteur ferroviaire alors que l'État n'a pas assumé ses responsabilités et a renoncé pendant trop longtemps à fixer les principes de son organisation. Avec l'ensemble des parties prenantes et dans le cadre d'un véritable dialogue social, nous ferons en sorte d'éviter l'ouverture à la concurrence avant que les entreprises ferroviaires publiques n'y aient été préparées. Nous savons, en effet, combien les conditions d'une telle ouverture ont été préjudiciables, notamment au fret SNCF.

Sans présumer du résultat des concertations, nous devrons simplifier le système en vigueur et, notamment, la gestion des infrastructures, laquelle devra concilier efficacité économique et sécurité juridique. Les compétences au sein de notre système ferroviaire sont aujourd'hui diffuses et ne répondent pas aux exigences de qualité, de sécurité et d'efficacité opérationnelles, qui plus est dans un contexte européen impliquant de nouer d'importantes relations bilatérales avec nos voisins allemands notamment.

Par ailleurs, le secteur routier connaît également des difficultés importantes : les PME subissent une concurrence difficile dont il ne faut pas sous-estimer la déloyauté et le caractère socialement inacceptable. Notre système est à bout de souffle !

Nous mettrons en place l'« écotaxe » poids lourds, sans que les répercussions économiques qui pourraient se faire jour pénalisent la vitalité et la compétitivité des entreprises et nous financerons ainsi les infrastructures nécessaires et l'accompagnement du secteur. Loin d'opposer les modes de transport entre eux, nous voulons au contraire en assurer la complémentarité.

Innovation de ce Gouvernement : la gestion des affaires maritimes ne sera plus divisée en une dizaine de secteurs ministériels en fonction des différents enjeux. Le ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie travaille donc à la mise en place d'une politique maritime intégrée, et j'aurai quant à moi l'honneur de présenter les axes de nos réformes en la matière devant les deux commissions concernées, la vôtre bien sûr et celle des affaires économiques.

Le Président de la République a eu l'occasion de dire combien les enjeux maritimes sont importants pour la France, pays qui possède le deuxième domaine maritime mondial. Il relève en effet de notre responsabilité de lier la réforme et l'accompagnement des complémentarités de l'interface terre-mer, les enjeux portuaires et le désenclavement de nos ports. Nous devons également tirer les conséquences du rôle de la mer dans l'économie mondiale et faire en sorte que la formation ainsi que l'attractivité des métiers de la mer deviennent autant de priorités. Précisément, nous veillerons à ce que l'installation de l'École nationale supérieure maritime soit effective et qu'aucun établissement ne soit négligé ou n'ait de craintes pour sa pérennité.

Les énergies marines renouvelables constituent également une priorité, de même que la protection de l'environnement marin. Dans le cadre de la décentralisation, des études concertées ont été engagées pour la création de parcs naturels.

Enfin, nous veillerons à réformer les services de l'État dans le domaine public maritime en favorisant notamment la déconcentration des services et la gouvernance par façade maritime qui est aujourd'hui nébuleuse – c'est un euphémisme – et d'une efficacité toute relative.

J'aurai sans doute l'occasion d'évoquer la question des transports aériens, mais je préfère que nous engagions le débat.

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