Intervention de Geneviève Levy

Réunion du 9 juillet 2013 à 17h00
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGeneviève Levy, rapporteure pour la famille :

Mes questions porteront sur le financement de la branche famille et sur la politique d'accueil du jeune enfant.

La dégradation des comptes de la Caisse nationale d'allocations familiales (CNAF) en 2013 sera supérieure à celle que vous annonciez dans le cadre du dernier projet de loi de financement : 3,2 milliards d'euros contre 2,5 milliards initialement prévus, soit 700 millions d'écart. En outre, pour la première fois en trois ans, la loi de financement ne fixait aucun objectif d'amélioration du solde de la branche et visait seulement à une stabilisation. Par défaut d'ambition, l'objectif initial n'est donc pas même atteint. Allez-vous envisager des mesures de résorption du déficit de la branche dès cette année ?

Concernant vos projets visant à ramener la branche à l'équilibre, je me félicite de la combativité des associations familiales et des membres du Haut Conseil à la famille. Ils vous ont fait renoncer à moduler les allocations familiales en fonction des revenus. En rompant avec le principe d'universalité des prestations familiales, vous auriez fragilisé une politique qui a jusqu'ici donné d'excellents résultats, ce dont témoignent le taux de natalité de la population française et le taux d'activité féminine. En outre, vous auriez fait peser sur les caisses d'allocations familiales des contraintes très lourdes. Enfin, vous auriez placé de nombreuses familles dans des situations difficiles, selon le niveau de leurs revenus au regard des seuils que vous auriez fixés.

Vous prévoyez de réduire l'avantage procuré par le quotient familial, comme vous l'avez déjà fait l'an passé. Cela limitera encore l'effet redistributif du quotient familial qui est un mécanisme indispensable pour, à revenu égal, faire contribuer davantage les foyers sans enfants que les foyers avec enfants.

Pouvez-vous préciser les modalités de réaffectation à la branche famille du surcroît de recettes pour l'État ? La mesure prise l'an passé a apporté au budget de l'État une recette supplémentaire de 500 millions d'euros qui n'a pas été utilisée pour redresser les comptes de la branche.

Je m'interroge enfin sur la lisibilité de la réforme pour le Parlement : certaines mesures figureront dans le projet de loi pour l'égalité entre les femmes et les hommes, d'autres en loi de finances. Pourtant leur examen global dans la loi de financement de la sécurité sociale représente une garantie de cohérence et doit permettre à la représentation nationale de mieux définir les conditions de l'équilibre de la branche.

Cet éparpillement est regrettable, car il sera plus difficile à l'ensemble des parlementaires, de la majorité comme de l'opposition, de modifier l'équilibre général de la réforme : à chaque fois, nous nous verrons opposer soit une irrecevabilité, soit l'argument selon lequel il s'agit d'un cavalier, soit le renvoi à un autre débat.

Pourtant, des mesures comme la réforme du congé parental ou de l'allocation de soutien familial sont loin d'être dépourvues d'incidence financière et trouveraient leur place en loi de financement. Vous semblez passer d'un extrême à l'autre après avoir, l'année dernière, présenté dans le projet de loi de financement une mesure d'expérimentation concernant le versement du complément de mode de garde totalement dénuée de conséquence financière. Je vous avais, à plusieurs reprises, alerté sur la probable censure du Conseil constitutionnel, qui n'a pas manqué d'advenir.

Concernant l'accueil du jeune enfant, vous annoncez une forte augmentation des crédits du Fonds national d'action sociale (FNAS) de la CNAF qui finance notamment les places d'accueil de jeunes enfants. Mais l'objectif que vous fixez de 100 000 places d'accueil collectif supplémentaires sur cinq ans est identique à celui qui avait été atteint les années précédentes, grâce à des mesures d'efficience et d'augmentation de la fréquentation des places.

Vous parliez beaucoup, l'an passé, de l'abrogation du « décret dit Morano » qui a pourtant permis d'améliorer la souplesse de l'accueil dans les établissements. C'était opposer inutilement l'efficacité à la qualité. À nouveau, je vous alerte sur le fait que les communes ne pourront pas s'engager rapidement dans de nouveaux projets si vous fixez des contraintes réglementaires qui augmentent inutilement leurs coûts, ce qui au demeurant annulerait les effets de l'accroissement des crédits du FNAS. En outre, pour les communes, s'ajoute la réforme des rythmes scolaires. Je sais les maires très inquiets du coût que ces mesures vont engendrer. Pouvez-vous donc, madame la ministre, nous indiquer les mesures que vous envisagez en matière d'efficience de l'accueil du jeune enfant ?

Enfin tout cela est tributaire de la nouvelle convention d'objectifs et de gestion liant la CNAF à l'État. La convention 2009-2012 a pris fin en décembre. Sa signature devait intervenir aujourd'hui. Je sais que cette situation est très mal vécue dans les caisses qui s'interrogent sur leurs budgets et leurs effectifs. Ce retard, totalement inhabituel, ne traduit-il pas le fait, madame la ministre, qu'il convient aujourd'hui de changer de méthode ?

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