Intervention de Paul Giacobbi

Réunion du 17 avril 2013 à 17h00
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul Giacobbi, président :

Nous avons le plaisir d'accueillir aujourd'hui, pour une audition ouverte à la presse, M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères.

Monsieur le ministre, comme vous le savez, la présidente de notre commission, Élisabeth Guigou, représente aujourd'hui le Président de la République aux obsèques de Margaret Thatcher, et les contraintes horaires de cette cérémonie ne lui ont pas permis de présider cette séance.

Nous sommes convenus de reconduire la procédure suivie lors de votre dernière audition, le 12 mars, où vous aviez proposé de répondre d'emblée aux questions des commissaires, sans propos introductif, cette façon de procéder permettant des échanges plus directs.

Vous ne manquerez pas, monsieur le ministre, de traiter des grands dossiers d'actualité internationale ayant trait à la sécurité de notre monde, et donc de la Corée du Nord, de l'Iran et de la Syrie. Je souhaite, pour ma part, vous poser quatre questions.

S'agissant de l'Iran, j'ai lu avec attention le rapport du conseil des gouverneurs de l'AIEA (Agence internationale de l'énergie atomique), à la fois accablant quant au non-respect par l'Iran des résolutions lui enjoignant de coopérer avec l'Agence et très inquiétant avec l'annonce du démarrage de centrifugeuses de nouvelle génération permettant d'accélérer le processus d'enrichissement de l'uranium. Compte tenu des avancées techniques et industrielles constatées par l'AIEA, dans quels délais prévisibles l'Iran pourrait-il disposer de matière fissile en quantité et qualité suffisante à la fabrication d'armes nucléaires ? Quelles démarches diplomatiques, ou d'une autre nature, la communauté internationale pourrait-elle engager pour interrompre ce mouvement ? Quelles initiatives compte prendre la France en ce domaine ?

Pour ce qui concerne la Syrie, en sus du groupe de travail qu'elle a mis en place, dont le président est Alain Marsaud et le rapporteur Serge Janquin, et qui a procédé à de multiples auditions, notre commission a auditionné récemment une experte académique américaine qui nous a brossé un tableau détaillé et réaliste de l'opposition syrienne, tant sur le plan politique que sur le plan militaire. Beaucoup d'entre nous s'interrogent sur les risques d'une éventuelle fourniture d'armes à ladite opposition. Le Gouvernement français y a-t-il ou non renoncé ? Quelles stratégies alternatives envisage-t-il ? Qu'en est-il notamment de l'institution d'une zone d'interdiction de survol des régions plus ou moins contrôlées par la rébellion, afin de prévenir les attaques aériennes de l'armée syrienne ?

Ma troisième question concerne l'UNESCO. J'ai été surpris de lire que notre représentant délivrait un satisfecit sur les réformes en cours. En effet, au même moment, la Cour des comptes, qui est l'auditeur des comptes de l'organisation, étrille – pardonnez-moi ce verbe, mais c'est encore un euphémisme – l'inefficacité, la lenteur et l'absence de cohérence de ces réformes. Nos représentants peuvent-ils contredire l'avis d'une juridiction dont la pertinence des analyses est reconnue dans le monde entier ?

Je terminerai en évoquant la puissance maritime française. La France est la deuxième nation au monde, après les Etats-Unis, par l'étendue de sa zone économique exclusive (ZEE), et sera la première, une fois mis en oeuvre le programme Extraplac d'extension du plateau continental. Depuis longtemps, je suis heurté par la manière dont on gère ces questions, critiquable sur le plan juridique et déficiente sur le plan politique. L'Assemblée nationale aura prochainement à se prononcer au sujet de la souveraineté de l'île de Tromelin. À ceux qui estimeraient le sujet secondaire, j'indique que cet îlot génère une zone économique exclusive d'une superficie supérieure à la moitié du territoire français métropolitain. On pourrait parler également de l'île de Clipperton. Enfin, alors même que sous la pression de notre commission des affaires étrangères, en particulier de Mme Annick Girardin, députée de Saint-Pierre-et-Miquelon, et de moi-même, la France, par la voix du Premier ministre de l'époque, François Fillon, avait déclaré aux Nations unies son intention de déposer un dossier d'extension du plateau continental au large de Saint-Pierre-et-Miquelon, alors même que les études bathymétriques et sédimentologiques menées par l'IFREMER, à l'initiative là encore de notre commission, ont démontré la validité incontestable de nos titres sur le plan scientifique, alors qu'aucun obstacle juridique ne saurait naître d'un arbitrage rendu précédemment puisque celui-ci exclut explicitement cette question, votre ministère semble se refuser à déposer cette demande. Les conditions techniques et juridiques de cette extension, au large d'un territoire français qui compte plus de 5 000 habitants, sont pourtant réunies. La France ayant précédemment annoncé qu'elle ferait valoir ses droits, son atermoiement aujourd'hui pose problème sur le principe, sans compter que l'on s'impatiente sur place.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion