Intervention de Martial Saddier

Séance en hémicycle du 10 avril 2013 à 21h30
Infrastructures et services de transports — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMartial Saddier :

Je n'en suis pas sûr, monsieur le ministre. Si c'est le cas, je vous prie de m'excuser.

Permettez-moi de remonter un peu le temps. L'écotaxe poids lourds, que nous avons adoptée à l'unanimité lors de son examen dans le cadre de la loi Grenelle 1, avait un triple objectif : réduire les impacts environnementaux du transport routier de marchandises, rationaliser le transport routier sur les moyennes et courtes distances et financer les nouvelles infrastructures de transport.

L'article 7 du présent texte a donc pour objet de fixer les modalités de répercussion de la taxe poids lourds. Il est ainsi prévu que le prix du transport soit majoré de plein droit pour la partie du transport effectuée sur notre territoire d'une somme résultant de l'application d'un taux qui est fonction des régions de chargement et de déchargement des marchandises transportées. Pour les transports internationaux, un dispositif similaire est prévu.

Cela n'aura échappé à personne : le secteur du transport routier traverse actuellement une crise économique importante qui nous oblige donc à adapter notre législation. Sans remettre en cause le principe même de l'écotaxe, que nous avions tous adopté, les députés du groupe UMP s'opposent fermement au dispositif de répercussion voulu par le Gouvernement car il comporte d'importantes lacunes. L'amendement « lait » est la démonstration même que le dispositif ne vous convient pas.

Tout d'abord, le principe de répercussion tel qu'il nous est présenté aujourd'hui prend uniquement en compte le transport pour le compte d'autrui, c'est-à-dire le transport routier, et laisse complètement à l'écart du dispositif les transporteurs en compte propre que sont les grossistes distributeurs. Il écarte également les transports de proximité pour intérêt général, tels que les livreurs de proximité.

En opérant ainsi une distinction entre les transporteurs pour compte d'autrui et les transporteurs pour compte propre, vous créez, monsieur le ministre, une rupture d'égalité devant l'impôt. À trajet égal, grossistes distributeurs et transporteurs devront s'acquitter du même montant de la taxe. Or, seuls ces derniers pourront, en appliquant le dispositif de l'article 7, répercuter ce montant sur leurs clients en majorant le prix de leurs prestations, car cette possibilité n'est pas ouverte aux transporteurs en compte propre.

De plus, ce nouveau dispositif touchera durement le transport de proximité, et donc le tissu économique local.

Cette situation ferait également courir le risque d'une réelle distorsion de concurrence entre le chargeur en compte propre et le chargeur recourant aux services d'un transporteur. Le premier sera ainsi redevable de l'écotaxe et le second de la majoration forfaitaire. Cette différence de traitement, nous pouvons tous le constater, n'est pas justifiée par un motif d'intérêt général. Ce constat nous amène à nous interroger sur une éventuelle censure de ce dispositif par le Conseil constitutionnel, soit avant la promulgation de la loi soit dans le cadre d'une question prioritaire de constitutionnalité.

Une telle incertitude conduira à un affaiblissement des moyens de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France et donc des avances versées par celle-ci.

Nos travaux en commission ont aussi soulevé d'importantes difficultés, notamment pour les entreprises qui utilisent plusieurs fois par jour une petite portion du réseau taxé ou qui effectuent des circuits courts. Jean-Marie Sermier l'avait justement souligné à plusieurs reprises.

Je regrette que ni les plans de protection de l'atmosphère ni la pollution de l'air n'aient été évoqués dans ce texte car, là aussi, des dispositions liées à ces plans s'appliqueront en sus de l'écotaxe.

Monsieur le ministre, dans votre réponse à M. Le Fur, qui a défendu la motion de renvoi en commission, vous avez admis que le transport était injustement payé par les collectivités territoriales et par l'État, ce qui est vrai. Pourtant, alors que le Sénat a adopté un amendement exonérant les véhicules propriété de l'État ou des collectivités territoriales, votre majorité, avec votre concours, a supprimé cette exonération. Nous déposerons des amendements pour revenir sur cette modification.

Le souhait du groupe UMP est et a toujours été que le dispositif de l'écotaxe poids lourds – en particulier, la mise en oeuvre du principe de répercussion – soit facile à appliquer, équitable, juridiquement solide et qu'il permette de dégager des ressources pour financer des infrastructures alternatives à la route. Or, dans sa rédaction actuelle, il se révélera rapidement coûteux en fonctionnement, illisible, inapplicable et pénalisant pour les TPE et PME.

Nous avons déposé beaucoup d'amendements. Aucun n'a été retenu en commission. Nous sommes constructifs et mon intervention était dans le même esprit.

Pour toutes ces raisons, et à cet instant du débat, le groupe UMP s'opposera au projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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