Intervention de Benoît Muracciole

Réunion du 13 mars 2013 à 9h30
Commission des affaires étrangères

Benoît Muracciole, président d'Action sécurité éthique républicaines :

Au Rwanda, c'est à l'aide d'armes légères et de petit calibre que les Interahamwe rassemblaient les populations qui allaient être massacrées à la machette. De nombreux témoignages attestent d'une large utilisation d'armes légères et de petit calibre, mais surtout de cette façon, pour menacer. Cet usage n'est pas rare. « Ils viennent parfois sans armes », me confiaient des habitants de RDC, « et disent que s'ils doivent revenir armés, alors ils violeront, tortureront, tueront ». Monsieur Lellouche, les armes légères et de petit calibre sont incluses dans le champ d'application du traité, car ce sont elles qui sont le plus utilisées non seulement dans les conflits, mais aussi lors des déplacements de population sous la menace de la violence des gangs et faute de régulation nationale, au Guatemala, au Salvador, au Mexique, en Afrique du Sud ou en Asie.

La convention d'Ottawa sur les mines antipersonnel a compté pour les ONG car elle leur a montré qu'il était possible de progresser sur ce sujet, ce qui est inestimable. Mais elle n'a rien à voir avec le traité dont nous discutons, qui est, je le répète, un texte de régulation et non d'interdiction. Nous avons besoin d'y associer les principaux exportateurs car ce sont eux que nous devons rappeler au respect d'une norme internationale. La France et l'Union européenne y ont intérêt car le traité pose des principes analogues à ceux de la position commune, norme juridique solide.

S'agissant des protocoles, c'est ASER qui a convaincu Amnesty International. Comment faire vivre le traité ? Qu'en sera-t-il dans dix ans ? Au-delà même de l'évolution technologique qui conduira à compléter la liste des armes, des droits politiques, des libertés fondamentales vont apparaître que les États devront prendre en considération dans leur appréciation du « risque prédominant ». L'adoption d'amendements par consensus laissant peu de chances aux États de s'entendre, le recours aux protocoles permet d'éviter le blocage.

Les neuf jours qui s'annoncent ne doivent pas être des moments d'affrontement, sans quoi nous aurons perdu notre pari. Nous avons besoin de trouver un terrain d'entente avec le plus grand nombre possible d'États. Monsieur Myard, ce domaine est bardé de résolutions onusiennes qui tournent en rond. C'est lorsque nous, ONG, intervenons que l'issue se profile. Par ce traité, nous n'avons pas introduit un nouveau texte dans le droit international : nous nous sommes fondés sur le droit international existant qu'une majorité d'États s'est déjà engagée à respecter, pour l'étendre au commerce des armes.

L'article 5, demandé par les Indiens, ne tient pas. Une grande majorité d'États est disposée à négocier pour obtenir d'écarter cette disposition relative à la coopération militaire. Les industriels en seront d'accord. L'un d'eux, américain, m'a assuré que la norme ne leur posait aucun problème à condition qu'elle soit claire. Des normes claires, voilà ce que nous souhaitons et que nous allons obtenir. Le fait que le traité ne soit pas parfait du point de vue juridique nous donne une marge de manoeuvre pour progresser sur ces points, notamment grâce aux pays africains. J'en fais le pari devant vous. Il le faut : la vie de millions de personnes est en jeu.

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