Intervention de Christian Bataille

Réunion du 8 mars 2017 à 15h00
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristian Bataille, député, vice-président :

Je vais commencer par un rappel historique. Mon premier contact avec la question des déchets de haute activité remonte à la fin des années 1980, lorsque Michel Rocard et son gouvernement m'ont confié, à travers l'Office parlementaire, une mission sur la gestion des déchets radioactifs, dans la perspective de la création d'un laboratoire en site géologique profond, qui est devenu le laboratoire de Bure.

À la fin de l'année 1991, j'ai été le rapporteur de la loi cadrant les recherches sur la gestion des déchets radioactifs de haute activité. Cette loi a été votée à l'unanimité du Parlement de l'époque. Elle a défini 3 axes de recherche – je les résume mais nous pourrons y revenir lors des questions – correspondant à trois modes de gestion des déchets radioactifs de haute activité : le stockage géologique profond, qui est dans l'actualité scientifique et politique, la réduction de la radioactivité à long terme par un processus de séparation-transmutation, dont on devrait sans doute parler davantage car il mobilise les moyens de recherche du CEA et des universités, et, enfin, l'entreposage de long terme, dans l'attente d'une solution définitive.

La loi a aussi, à cette époque, transformé la direction du CEA chargée de la gestion des déchets radioactifs en un établissement public indépendant : l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA).

Enfin, cette loi, qui s'inscrivait dans une perspective de moyen terme, a prévu un nouveau rendez-vous législatif, quinze ans plus tard, en 2006, pour faire le point sur l'avancement des recherches et décider des conditions de la mise en oeuvre des solutions identifiées au cours de cette période.

L'ANDRA a remis, en 2005, un dossier concluant à la faisabilité d'un stockage géologique profond en Meuse, qui a fait l'objet d'un examen par l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN), par la Commission nationale d'évaluation des études et recherches sur la gestion des déchets radioactifs (CNE) et par l'Office parlementaire.

La même année, un débat public sur la gestion des déchets radioactifs a été organisé.

À partir de tous ces éléments, le Parlement a décidé, à travers de la loi du 28 juin 2006, votée elle aussi à l'unanimité, sous réserve de quelques abstentions, la construction d'un centre de stockage géologique profond, réversible sur une période d'au moins cent années.

Comme la loi précédente, celle de 2006 a prévu un nouveau rendez-vous législatif, destiné à définir la notion de réversibilité du futur stockage.

En 2012, l'ANDRA a préparé un nouveau dossier, présentant les grandes lignes du futur centre de stockage. Sur la base de ce dossier, un deuxième débat public consacré à ce projet a été organisé en 2013 par la Commission nationale du débat public (CNDP), en 2013.

Notre rapport d'évaluation du précédent PNGMDR appelait au vote d'une nouvelle loi sur le projet de stockage géologique CIGEO, destinée à lever les derniers obstacles à sa construction et à prendre en compte les résultats du débat public.

Cette loi a été votée, à l'initiative des membres de l'Office, par les parlementaires de la majorité et de l'opposition, au Sénat puis à l'Assemblée nationale. Il s'agit de la loi du 25 juillet 2016 qui définit la réversibilité, comme le demandait la loi de 2006, et prévoit en début de construction de la future installation, une phase industrielle pilote, destinée à expérimenter, en vraie grandeur, les solutions mises au point en laboratoire.

Un nouveau rendez-vous parlementaire est prévu, à l'issue de cette phase pilote, sur la base d'une évaluation de ses résultats par l'ASN, la CNE et l'OPECST, vers 2035.

Si je rappelle tout cela d'une façon un peu fastidieuse, c'est parce qu'on peut considérer qu'aucune décision de construction d'une grande installation n'a fait l'objet d'autant de précautions et de consultations : du Parlement, de la population, de l'autorité de sûreté et des autres parties prenantes. Il est par conséquent vraiment fallacieux de dire que cette décision a été prise dans la précipitation. Elle a été prise, au contraire, dans la durée, par étapes, avec prudence, et dans la raison.

Les conditions sont donc réunies pour que le projet de stockage géologique puisse entrer dans sa phase de réalisation, – nous y sommes – la prochaine étape concernant le dépôt par l'ANDRA de la demande d'autorisation de création de la future installation. La prochaine Assemblée nationale et le Sénat se pencheront encore sur le sujet en 2018. Les travaux de recherche vont également se poursuivre, afin de trouver les meilleures solutions pour la réalisation du stockage.

L'actuel directeur général de l'ANDRA, M. Pierre-Marie Abadie, a déclaré lors de son audition dans le cadre de nos travaux : « le rendez-vous de mi-2018 est celui, important, de la remise formelle de la demande d'autorisation de création de CIGEO. Conformément au calendrier, nous y mettrons toutes les informations qui sont nécessaires pour pouvoir statuer en termes de sûreté. Mais, bien évidemment, nous ne prétendons pas avoir répondu à toutes les questions scientifiques et toutes les questions de connaissances qui vont continuer à s'accumuler, pendant les décennies de fonctionnement. »

Je ne veux rajouter que quelques mots après ces considérations. Ce qui est en jeu, c'est une installation unique au monde et qui a fait l'objet d'une concertation politique et sociale sans égal. Par conséquent, je pense, comme beaucoup de membres de l'Office parlementaire qui s'appuient sur des principes rationnels, qu'on ne peut être qu'ulcéré et agacé des commentaires mal informés qui sont faits dans la presse, dans les milieux politiques, dans certains programmes politiques, et qui aboutissent à des considérations dénuées de fondement.

Je passe maintenant la parole à Christian Namy pour la conclusion.

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