Intervention de Général Hervé Wattecamps

Réunion du 5 avril 2016 à 16h15
Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Général Hervé Wattecamps, directeur de ressources humaines de l'armée de Terre :

Passer en troisième est un peu compliqué… et en même temps très facile, car il y a une pensée commune entre les trois armées. Ce qui est fait par la Marine et l'armée de l'Air, l'armée de Terre le fait aussi, avec des objectifs similaires.

Le point extrêmement important, et qui fait la différence avec la haute fonction publique est que, tout général a commencé par le grade de lieutenant. Ayant dit cela, on a quasiment tout dit. La légitimité du haut encadrement militaire, ce qui correspond aux colonels et aux généraux – c'est-à-dire à un volume d'un peu moins de 1 % de l'armée de Terre – vient du fait d'avoir été lieutenant un jour, puis capitaine et donc d'avoir commandé.

On vit aujourd'hui une période singulière en France, avec une menace qui est très importante et un emploi extrêmement important de toutes les forces. On voit bien que cette notion de chef au combat ou en intervention, est capitale. La légitimité d'un chef d'état-major, d'un officier général ou d'un colonel, c'est bien sûr d'avoir été respectable et respecté et d'avoir rempli sa mission à tous les grades et à tous les temps de responsabilité. Ces responsabilités dans l'armée de Terre consistent successivement à être lieutenant et commander trente personnes, être capitaine et commander environ cent cinquante personnes, puis devenir colonel et commander un régiment de mille hommes, et être général et commander une brigade de six mille ou sept mille hommes.

Ce cheminement pour parvenir au haut encadrement militaire est extrêmement sélectif, il se traduit donc par un haut degré d'échec. Sur une année, les Saint-Cyriens sont à peu près 145 ; le nombre de ceux qui réussissent l'école de guerre, qui est une étape obligée de sélection au grade de commandant, est de 85 ; l'accès au grade de colonel concerne 75 personnes et l'accès au généralat 22. Vous voyez les filtres à travers desquels il faut passer pour accéder au haut encadrement militaire.

Ce travail de sélection est effectué à travers la notation, mais aussi grâce à des regards extérieurs d'assessment center, à deux moments de la carrière. D'abord, au moment de l'école de guerre qui rassemble les trois armées après la réussite à un concours de même difficulté ; on y évalue le potentiel de chacun et l'oriente vers des dominantes de métier. Le deuxième rendez-vous est celui de l'accès au grade de colonel, moment où l'on demande à l'organisme extérieur, en plus de notre regard, de se prononcer sur le potentiel de l'intéressé.

Ces outils extérieurs de sélection s'étagent donc au long de la carrière, en marquant le temps important, qui est celui du commandement d'un régiment. Comme cela a été dit, c'est un chef au combat qui emmène ses hommes, avec une mission à remplir dans un cadre espace-temps. Cela nécessite des qualités qui sont bien connues des gens qui connaissent le milieu militaire. Pour nous, le point capital est l'accès au grade de colonel, puis d'officier général, pour être sûr d'avoir sélectionné les bons profils pour répondre à toutes les exigences d'aujourd'hui.

Après la sélection, il faut évoquer l'accompagnement. L'une des qualités du fonctionnement du monde militaire est l'individualisation des parcours ; ce qui suppose un service de ressources humaines qui est assez important, plus important en volume que celui d'autres ministères.

Il y a ensuite une période où l'on positionne tous ceux d'un même millésime pour qu'ils sachent où ils en sont dans leur carrière ; tous nos colonels par exemple vers quarante-trois, quarante-quatre ans. À cet âge, on est capable de leur dire où on les voit dans cinq ou dix ans. C'est un engagement fort, parce que la personne a encore un temps de parcours – la limite d'âge est de cinquante-neuf ans – mais cela lui permet de choisir : soit elle continue au sein de l'armée de Terre, soit au vu de ses perspectives elle change de métier. C'est un point important qui n'existe pas dans le reste de la fonction publique et qui est une vraie caractéristique du monde militaire.

Parmi les qualités d'un haut potentiel, vient en premier lieu, le discernement. C'est ce que je dis à tous les personnels que je reçois, c'est la première des qualités d'un officier. La deuxième est le courage – dans tous les aspects. Au vu de la situation nationale et internationale on a besoin de chefs militaires courageux pour remplir les objectifs et les missions demandées.

En conclusion, il y a dans l'armée de Terre (comme dans les autres armées) un niveau de sélectivité qui est assez inégalé par rapport au reste de la fonction publique. On ne naît pas dans le haut encadrement militaire ; il faut faire ses preuves tout au long de la carrière, et je pense que c'est vraiment notre force par rapport à d'autres fonctions publiques.

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