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Intervention de Alain Marleix

Réunion du 7 février 2017 à 17h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlain Marleix, co-rapporteur :

Je vais maintenant aborder les relations entretenues avec les marines riveraines. Elles revêtent deux aspects : les actions de coopération et les actions de formation.

Concernant la coopération et au niveau de la rive nord, les principaux partenaires de la marine nationale sont l'Espagne et l'Italie, mais également le Portugal et Chypre. Avec les trois premiers, la relation bilatérale dans le domaine naval est d'ailleurs encadrée par un plan de coopération, validé périodiquement par les états-majors des marines concernées. Au-delà des relations bilatérales, les interactions entre la marine nationale française et les autres marines de la rive nord se déroulent également dans un cadre multilatéral, notamment au sein de l'OTAN. Elles peuvent aussi se traduire par la participation à des exercices et des entraînements spécifiques organisés par la France.

Avec les pays de la rive sud, les activités de coopération opérationnelle sont organisées, selon le partenaire, sur une base annuelle ou bisannuelle. Deux pays se détachent nettement. L'Égypte constitue naturellement notre partenaire principal, et la coopération entre les deux marines prend corps avec l'exercice Cleopatra. Par ailleurs, un exercice Ramsès d'interactions avec le groupe aéronaval français a été organisé au mois de mars 2016.

Le Maroc est notre deuxième partenaire et, à cet égard, la vente d'une FREMM à ce pays a permis à sa marine de franchir une marche opérationnelle et de dynamiser le partenariat avec la France. En outre, un exercice annuel de sécurité et de sûreté maritimes, Chébec, est organisé entre nos deux marines.

Avec Israël, la coopération est à ce stade plus modeste, mais elle prend progressivement de l'ampleur. En témoignent la multiplication des escales de la marine nationale dans le port de Haïfa, et l'organisation de l'exercice annuel Carmel.

La coopération est en revanche peu développée avec les autres pays de la rive sud. Avec la Tunisie, elle est structurellement modeste compte tenu notamment des différences de niveau opérationnel et de la disponibilité des équipements tunisiens. Elle s'est toutefois intensifiée depuis les attentats qui ont touché le pays et se concrétise notamment dans le domaine de la protection défense. Des audits de protection des bases navales ont ainsi été conduits par la force des fusiliers-marins et commandos française. Un exercice annuel, Pangolin est également organisé. Avec l'Algérie, un exercice de sécurité et sûreté maritimes, Raïs Hamidou, a lieu tous les ans. Avec le Liban, les relations prennent la forme d'escales et passent par l'organisation d'un exercice bilatéral Cèdre bleu.

Nous devons dire un mot de notre coopération avec une marine extérieure au bassin méditerranéen : la Navy américaine. La marine nationale est sa première alliée, ce qui témoigne de son excellence opérationnelle et de sa maîtrise de l'ensemble des capacités militaires. Il faut d'ailleurs souligner l'événement qu'a constitué la prise de commandement par le porte-avions Charles-de-Gaulle, en décembre 2015, de la Task Force 50 américaine dans le cadre d'Arromanches 2. Le symbole était particulièrement fort et révélateur, puisque cette Task Force n'avait jusqu'alors jamais été dirigée par une force navale étrangère.

Concernant les formations délivrées par la marine nationale aux marins étrangers, il faut souligner qu'elles sont mutuellement bénéfiques. Pour les marines étrangères, elles permettent l'acquisition ou le renforcement de certaines compétences et savoir-faire. Pour la France, il s'agit d'un outil d'influence. Pour les deux marines, elles permettent d'accroître leur connaissance mutuelle et l'interopérabilité de leurs unités. Ces actions sont naturellement, mais pas seulement, liées aux relations nouées au niveau industriel dans le cadre des exportations d'armement, domaine dans lequel la France a beaucoup progressé.

Le principe est que la marine nationale n'offre pas de formations « sur-mesure » aux stagiaires étrangers. Elle propose uniquement des formations destinées par ailleurs à son propre personnel. Une telle politique impose un certain nombre de prérequis dont, en principe, la pratique de la langue française. Logiquement, elle limite aussi le champ des offres possibles puisqu'une partie des formations est interdite aux stagiaires étrangers pour d'évidentes raisons de confidentialité. Les demandes spécifiques de formation seront dès lors redirigées vers un prestataire extérieur, généralement le groupe Défense Conseil International. Ces formations « externalisées » sont labellisées par la marine nationale afin d'assurer leur conformité aux standards opérationnels et de ne pas dégrader le degré de qualité recherché par les bénéficiaires.

Dernier rôle que nous souhaitons présenter : l'action indispensable de la marine en matière de soutien aux exportations. En témoignent les expressions utilisées par les industriels que nous avons rencontrés et qui ont évoqué le « soutien remarquable » de la marine, ou encore la « relation exceptionnelle » entretenue avec elle.

Nous tenons toutefois à rappeler que si les actions de SOUTEX sont indispensables, une exigence doit primer : c'est la préservation des capacités opérationnelles de notre marine. Dans ce domaine comme dans celui de la formation, il existe un équilibre à préserver. Il ne faut pas « sacrifier » la capacité opérationnelle de notre marine sur l'autel des exportations, en réduisant ou en reportant les livraisons qui lui sont destinées pour satisfaire une demande étrangère. C'est un point très important et il convient d'être très attentif à ce sujet. Je rappelle que si l'aspect export n'est pas étranger à la conception de la frégate de taille intermédiaire (FTI), ce navire a aussi et d'abord vocation à satisfaire les besoins de la marine nationale pour respecter la trame de 15 frégates de premier rang.

En guise de conclusion nous souhaitons formuler quelques observations.

Sur l'opération Sophia, nous estimons que tant qu'elle ne pourra pas déployer son action dans les eaux territoriales libyennes, elle sera incapable d'honorer son mandat. Même s'il s'agit d'un dossier sensible pour les autorités libyennes avec des considérations légitimes en termes de souveraineté, une telle extension est indispensable. Tout doit donc être entrepris au niveau diplomatique, que ce soit au Conseil de sécurité des Nations unies ou directement avec les autorités libyennes pour obtenir l'accès à ces zones. Nous pensons que les États européens ne devraient pas s'interdire d'exercer une pression en ce sens, par exemple en conditionnant les actions de formation des garde-côtes libyens à une garantie d'accès.

En revanche, dans l'hypothèse où cet accès demeurerait interdit, nous devrions sans doute envisager un rééquilibrage entre les moyens militaires et civils. Une partie des moyens militaires actuels contribuerait naturellement au contrôle de l'embargo. Une autre partie continuerait à exercer des missions de secours, mais le recours aux capacités civiles devrait être plus largement recherché. L'Union européenne pourrait ainsi participer davantage à l'affrètement de navires civils. Directement, en armant des navires, ou indirectement, en participant au financement de structures civiles compétentes, dont nous tenons par ailleurs à saluer l'action. Cela permettrait de redéployer une partie des moyens militaires actuels, par nature précieux et comptés, vers des missions de nature réellement militaire. Mais cela permettrait également de réduire le coût du déploiement, tout en continuant à porter assistance aux migrants.

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