Intervention de Meyer Habib

Séance en hémicycle du 7 février 2017 à 15h00
Sécurité publique — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMeyer Habib :

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la sécurité est la première des libertés. Elle est la condition d’une société digne de ce nom. Policiers nationaux ou municipaux, gendarmes, agents des douanes, agents de l’administration pénitentiaire, tous exercent avec courage, professionnalisme et disponibilité des missions qui sont une impérieuse nécessité pour assurer la sécurité des Français.

Ils sont exposés à une menace terroriste particulièrement élevée, comme nous l’avons encore vu, malheureusement, vendredi dernier où, attaqué à coups de machette et aux cris de « Allah Akbar ! », un militaire de l’opération Sentinelle a réagi avec un grand héroïsme et neutralisé la menace. On pense aussi, évidemment, à Ahmed Merabet, policier assassiné en janvier 2015 devant le siège de Charlie Hebdo, à Jean-Baptiste Salvaing et Jessica Schneider, ce couple de policiers assassinés en juin dernier à Magnanville devant leur fils de trois ans, et à d’autres encore.

Cibles privilégiées des djihadistes, policiers et gendarmes sont aussi confrontés à un crime organisé qui n’hésite pas à ouvrir le feu. On se rappelle ainsi ce policier de la brigade anti-criminalité – BAC – grièvement blessé durant une intervention en Seine-Saint-Denis, en octobre 2015, par un braqueur fiché S armé d’une kalachnikov.

Plus encore, nos forces de l’ordre sont aujourd’hui fréquemment agressées, dans ces territoires perdus de la République, par une petite délinquance de plus en plus violente, comme l’a tristement illustré en octobre dernier, à Viry-Châtillon, cette stupéfiante agression où quatre de nos policiers ont été visés par des cocktails Molotov.

Permettez-moi d’avoir ici, monsieur le ministre, et bien que cela n’ait pas de rapport direct avec l’agression que je viens d’évoquer, une pensée émue pour ce serveur de la buvette de l’Assemblée nationale qui s’est efforcé de défendre une vieille dame et qui se bat aujourd’hui entre la vie et la mort.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : en 2016, 26 policiers et gendarmes sont morts en service et 16 000 ont été blessés. Face à l’émotion de l’opinion publique, le Gouvernement a décidé de réagir – enfin !

Il est toujours difficile, dans une société démocratique, d’aborder le sujet de l’usage légal de la force armée. Cette question a trait à l’essence même de notre pacte républicain, qui veut que la puissance publique dispose du monopole de la violence légitime. L’enjeu est simple, mais fondamental : concilier l’exercice de la puissance publique, de la violence légitime, et le respect absolu du droit à la vie. Les terroristes et le grand banditisme exploitent notre système de protection des libertés publiques comme autant de failles. Le projet de loi que nous examinons consacre donc l’usage de la force armée en cas d’« absolue nécessité » et de « stricte proportionnalité ».

Comme je le rappelais dans cet hémicycle voilà deux ans, il s’agit de trouver le juste équilibre entre le modèle américain, dont nous connaissons et rejetons les excès, et notre système actuel, où les règles d’emploi de la force armée ne sont pas claires et ne permettent pas toujours de répondre efficacement aux menaces auxquelles nous faisons face.

C’est la raison pour laquelle, le 2 avril 2015 déjà, je défendais la proposition de loi de notre collègue Éric Ciotti visant à soumettre aux mêmes règles policiers et gendarmes dans l’emploi de la forcée armée. Votre Gouvernement s’y est opposé. Les 2 et 3 mars 2016, lors de l’examen du projet de loi de lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, j’ai déposé, comme d’autres, un amendement visant à harmoniser le régime de la légitime défense des gendarmes et des policiers nationaux. Votre gouvernement l’a également rejeté, alors même que le Conseil d’État, que vous aviez saisi pour avis, recommandait le 3 février d’« harmoniser les règles applicables aux policiers et aux gendarmes, ces deux forces étant désormais placées sous une même autorité » : la vôtre, monsieur le ministre. Qu’en avez-vous fait ? Rien, hélas.

Votre prédécesseur, aujourd’hui Premier ministre, affirmait même dans l’hémicycle que « la jurisprudence a largement aligné les deux régimes, au point de faire disparaître presque totalement les différences qui pouvaient exister entre eux ». Pourquoi, alors, un tel revirement, si tardif ? Parce que les attaques récentes contre nos forces de l’ordre vous ont fait réagir.

Ce projet de loi est, en définitive, à l’image de la politique de lutte antiterroriste menée par les gouvernements socialistes depuis quatre ans : toujours, hélas, dans une posture de réaction et jamais dans une logique d’anticipation. Il aura ainsi fallu quinze ans de lutte des syndicats policiers,…

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