Intervention de Christophe Sirugue

Séance en hémicycle du 24 janvier 2017 à 15h00
Adaptation du code minier au droit de l'environnement — Présentation

Christophe Sirugue, secrétaire d’état chargé de l’industrie :

Monsieur le président, madame la ministre, chère Ségolène Royal, monsieur le rapporteur, cher Jean-Paul Chanteguet, madame la rapporteure pour avis, chère Marie-Noëlle Battistel, mesdames et messieurs les députés, en tant que secrétaire d’État en charge des mines, j’attache une importance particulière à cette proposition de loi visant à moderniser le code minier. Lorsque M. le président de la commission, rapporteur du texte, est venu me rendre visite pour me proposer cette discussion, je n’y ai vu que des avantages.

Cette réforme, dont je ne retracerai pas l’historique, peut être qualifiée de travail mixte. Entamée par un groupe de travail pluraliste dirigé par Thierry Tuot, que je tiens à saluer pour le travail mené, elle a été poursuivie par le travail du Gouvernement et de ses administrations et par celui du Parlement, qui a permis le dépôt de cette proposition de loi sur laquelle nous nous apprêtons à travailler. Je pense pouvoir dire que ce travail mixte est un travail de qualité et je tiens à saluer M. Chanteguet pour son implication forte et l’impulsion qu’il a su donner à ce texte.

Cette réforme est attendue, par la société civile, par les élus, par les professionnels et par l’État, pour des raisons diverses.

La société civile et les élus souhaitent que les enjeux environnementaux soient mieux pris en compte dans les procédures d’instruction des titres miniers et que leur transparence soit garantie grâce à une association renforcée du public et des territoires le plus en amont possible des décisions.

Les professionnels appellent à l’installation d’un cadre juridique stabilisé et modernisé, permettant d’intégrer le plus en amont possible dans les projets les exigences réglementaires à respecter. Ils attendent des procédures clarifiées et des délais de décision maîtrisés et plus courts.

Quant à l’État, il souhaite que cette réforme, menée dans la concertation, garantisse les engagements pris dans le cadre de l’accord de Paris, mais permette également de valoriser les ressources du sous-sol, dans le respect des exigences environnementales. Dans cet objectif, ce texte prévoit de créer un Haut conseil des mines et de rédiger une politique nationale minière qui permette d’identifier les ressources clés pour notre économie et d’inscrire dans le débat public la réduction de notre dépendance aux importations.

Même si la priorité est naturellement au recyclage et à la valorisation des ressources secondaires, nous devons faire évoluer notre approche des projets miniers pour réduire notre dépendance aux importations de matière première et consolider nos filières industrielles.

La politique que nous menons s’inscrit résolument dans l’économie circulaire, selon une hiérarchisation des ressources. Celle-ci est définie par la loi pour la transition énergétique et la croissance verte : prévenir l’utilisation des ressources, promouvoir une consommation sobre et responsable des ressources, privilégier les ressources issues du recyclage ou de sources renouvelables, les ressources primaires devant être exploitées en dernier recours.

C’est pourquoi je soutiens naturellement toutes les initiatives pour accroître le recyclage, en particulier celui des métaux issus des déchets électroniques.

Malgré la priorité accordée à la valorisation des matières secondaires, notre sous-sol reste intéressant pour extraire quelques matières premières. Cela explique le regain d’intérêt manifesté, ces dernières années, par diverses sociétés minières, qui s’est traduit par une quinzaine de demandes de permis exclusifs de recherche en métropole et autant en Guyane. Ce n’est pas surprenant. Les indices de métaux sont nombreux : nous avons du tungstène, de l’antimoine, du germanium, du gallium, du lithium, qui sont tous des métaux stratégiques.

Nous exploitons aussi du sel, ce qui représente 5 000 emplois et approvisionne notre industrie chimique et nos cuisines, sans parler du sel de déneigement. De même, l’or représente une réelle opportunité économique en Guyane pour lutter contre le chômage, développer des savoir-faire et valoriser le territoire.

Nous ne devons pas regarder notre passé industriel et minier avec nostalgie ou regret. D’ailleurs, les techniques actuelles permettent parfois de reprendre l’héritage de ces anciennes mines ou leur dépôt. Les traces laissées par les exploitations minières passées ne peuvent cependant pas être ignorées, pas plus que les contributions de cette industrie au développement et à la prospérité de notre pays. Ces enjeux sont au coeur des propositions formulées, ce qui me permet de qualifier cette proposition de texte d’équilibre.

Pour revenir à la réforme examinée ce soir, les objectifs fixés par le Gouvernement dès 2012 étaient de mettre le code minier en conformité avec la Charte de l’environnement, sans affaiblir l’intérêt économique des activités minières, pour toutes les activités régies par le code minier, qui sont nombreuses et variées comme je viens de l’évoquer.

Je comprends et je partage les craintes pour l’environnement exprimées par certains, mais je suis persuadé qu’il est possible de recréer une activité minière en France dans le respect des normes environnementales et du dialogue d’aujourd’hui. D’autres pays européens le font – la Suède, la Finlande, le Portugal, l’Autriche. Les technologies existent, le savoir-faire français est reconnu.

J’entends aussi les attentes des populations et de leurs élus, qui veulent prendre part à la décision, être écoutés, être rassurés et juger par eux-mêmes avant même qu’une décision soit prise. La réforme que vous proposez, mesdames et messieurs les députés, répondra justement à ces attentes.

Je souligne tout particulièrement l’exigence d’une évaluation environnementale pour les titres miniers, l’établissement de critères environnementaux pour le refus des titres miniers, et l’instauration d’un groupement participatif d’information et de concertation appelé à émettre un avis sur les demandes de titres miniers.

Je fais confiance pour cela aux élus locaux qui accompagneront la concertation en dehors de toute quantification des opposants. Je salue aussi la création d’un espace de débat national et l’exigence d’une politique nationale des ressources et des usages miniers articulée avec la politique de recyclage et de valorisation des matières secondaires, dans le respect de nos engagements climatiques.

Au cours des débats, je défendrai particulièrement la proposition d’élargir les missions de pré-indemnisation des dommages immobiliers, exercées par le Fonds de garantie des assurances obligatoires, aux publics les plus fragiles, qui ne peuvent supporter les coûts et la durée d’une procédure contentieuse à l’encontre du responsable des dommages, tout en réclamant une définition solide du dommage minier, centrée sur les dommages matériels aux biens et aux personnes.

Je souhaite également que les discussions qui auront lieu sur cette proposition de loi ne portent pas atteinte aux jurisprudences usuelles du code de l’environnement, notamment pour ce qui concerne la prescription trentennale et le référé sans urgence. Je souhaite aussi qu’elle respecte les nouvelles procédures de dialogue environnemental créées à l’initiative de Mme la ministre l’année dernière.

Concernant les hydrocarbures non conventionnels, la priorité du Gouvernement sera d’en donner une définition pragmatique afin d’interdire précisément les gaz de schiste, pour que les choses soient clairement assumées par les uns et les autres, sans que cela porte préjudice à d’autres gisements, qu’il s’agisse du pétrole conventionnel exploité depuis des décennies ou de l’exploration de gaz de houille qui se déroule convenablement en Lorraine – sans faire appel à la fracturation hydraulique, différence significative. Même si nos engagements climatiques nous imposent, ce qui est une bonne chose, d’évoluer vers une société décarbonée à l’horizon du milieu du siècle, nous poursuivrons notre trajectoire afin de respecter l’objectif fixé dans la loi relative à la transition énergétique de réduire de 30 % notre consommation d’hydrocarbures en 2030. Il est toujours préférable d’en produire une petite partie en France plutôt que de tout importer.

Je fais confiance aux élus présents dans cet hémicycle pour porter les débats sur les valeurs du code minier et la prise en compte de l’environnement, pour respecter les projets dont nous avons besoin, qu’ils soient industriels, stratégiques ou sociétaux, et pour valoriser l’exploitation minière, quelle qu’elle soit. Et je remercie à nouveau M. le rapporteur et les commissions pour leur travail, qui nous permet de poursuivre les efforts réalisés depuis quelques années par le présent gouvernement.

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