Intervention de Jean-Marie le Guen

Réunion du 8 novembre 2016 à 21h00
Commission élargie : finances - affaires économiques - développement durable - affaires étrangères

Jean-Marie le Guen, secrétaire d'état chargé des relations avec le Parlement :

Vous l'avez indiqué, monsieur Vigier, l'activité de l'ensemble des juridictions administrativescontinue de s'accroître, sous l'effet de divers contentieux de masse qui, s'ils révèlent l'appropriation de leurs droits par nos concitoyens, ont requis l'augmentation des crédits du programme 165. Cette augmentation reste toutefois maîtrisée, à hauteur de 2,6 %, et consiste essentiellement en des dépenses de titre 2, avec la création de soixante nouveaux postes. Sur ces soixante nouveaux postes, les deux tiers sont affectés à la CNDA.

Vous l'avez également souligné, l'activité de cette cour est en forte augmentation : elle a jugé 35 961 affaires en 2015, soit 50 % de plus qu'en 2010. Sur la même période, la hausse des entrées a été de 41 %. La Cour a ainsi réduit de manière significative ses délais de jugement, ramenés à sept mois et dix-sept jours en 2015 alors qu'ils avoisinaient quinze mois en 2010. La hausse de ses effectifs, associée à la création d'une procédure accélérée à juge unique et sa nouvelle structuration en chambres, réformes issues de la loi relative au droit d'asile, devraient ainsi lui permettre de stabiliser ses effectifs et d'améliorer encore ses délais de jugement. Bien entendu, le nombre de demandeurs d'asile pour les années à venir ne peut être connu par avance, mais il est de toute façon de meilleure politique, tant sur le plan humain que budgétaire, de donner les moyens à la CNDA de faire face à ces demandes que de laisser les délais de jugement s'allonger.

Le contentieux relatif au DALO est en repli. Au 30 juin 2016, un peu plus de 5 000 requêtes avaient enregistrées, soit un recul de 4,5 % par rapport à 2015. En outre, la charge de travail des juridictions pour le traitement de ce contentieux a été allégée du fait de la modification du régime de la liquidation provisoire de l'astreinte, issue de l'article 142 de la loi de finances pour 2016. Les juridictions ne sont plus obligées, comme c'était très souvent le cas auparavant, de prendre l'initiative d'un contact avec les préfectures ou les requérants pour connaître l'état d'avancement des dossiers.

La question du DALO ne peut être appréhendée à partir des seuls éléments budgétaires. Il faut qu'elle soit posée de manière globale, par les parlementaires, qui ont voté le DALO à l'unanimité, si je me souviens bien.

Vous m'avez également interrogé sur les moyens alloués à la Cour des comptes et aux chambres régionales des comptes pour accomplir leurs nouvelles missions. Concernant l'expérimentation de la mission de certification des comptes des collectivités territoriales, un échantillon de vingt-cinq collectivités représentatives a été retenu. À compter de l'exercice 2017 et jusqu'au dépôt des comptes de l'exercice 2019, les juridictions financières accompagneront les collectivités expérimentatrices dans une démarche progressive d'évaluation de la fiabilité de leurs états financiers. Cet accompagnement débutera par la réalisation d'un diagnostic global d'entrée sur les comptes de 2017, qui sera complété, au cours des exercices suivants, par des audits plus ciblés.

La « budgétisation » des moyens humains qui seront sollicités dans la période 2017-2020 est difficile à effectuer. Une équipe mixte Cour des comptes-CRC, composée de magistrats, de vérificateurs et d'experts, travaillera sur chacune des collectivités. La quotité de temps à consacrer sera évidemment variable en fonction des collectivités, de leur taille et de leur degré de préparation – entre une vingtaine de jours pour les petites collectivités et de 150 à 200 jours pour les collectivités départementales ou régionales. Cette évaluation devra être affinée au fil du temps. À ce jour, toutefois, on peut évaluer les moyens humains nécessaires de quinze à vingt ETPT supplémentaires à l'horizon 2020. Cela pourra nécessiter, à cet horizon, l'affectation de ressources supplémentaires.

Le Parlement a ajouté des contrôles sur les établissements et services sociaux et médico-sociaux et établissements de santé privés. Le projet de décret d'application a été transmis au Conseil d'État, et les premiers contrôles débuteront sur cette base en 2017.

Dans un premier temps, des contrôles coordonnés entre la Cour et les chambres régionales porteront sur un échantillon restreint d'établissements. Ces premiers travaux se feront à moyens constants. Dans un second temps toutefois, la charge pour les juridictions financières pourrait nécessiter des réorganisations, voire l'affectation de moyens supplémentaires. II faudra cependant davantage de recul pour déterminer quel sera le périmètre de contrôle le plus pertinent, et donc les coûts associés à cette mission qui, je le rappelle, a pour but d'assurer une plus grande transparence et une plus grande efficacité dans l'utilisation de fonds d'origine publique.

Enfin, comme je vous l'ai déjà indiqué, le Gouvernement n'est pas défavorable à la fusion du programme relatif au Haut Conseil des finances publiques dans le programme 164. Les fortes contraintes ayant pesé sur l'ordre du jour cette année ne lui ont cependant pas permis d'inscrire ce texte à l'ordre du jour prioritaire. Je remarque que le groupe UDI ne l'a d'ailleurs pas non plus inscrit sur son ordre du jour réservé – il ne peut, certes, j'en conviens, porter à lui tout seul l'intérêt général.

En ce qui concerne le CESE, je vous rejoins totalement, et nous voulons lui accorder une importance politique. La nouvelle orientation du CESE et sa façon de travailler plus en harmonie avec les saisines des assemblées ou du Gouvernement peuvent produire des résultats tout à fait utiles. Je m'associe pleinement aux propos que vous avez tenus à propos de ses moyens de fonctionnement.

Une fois encore, monsieur Vigier, je vous remercie pour la grande qualité des travaux que vous avez conduits.

En ce qui concerne la mission « Pouvoirs publics », je vous remercie, monsieur le rapporteur spécial Marc Le Fur, d'avoir souligné que le Gouvernement n'est aucunement maître des budgets des institutions concernées. Il ne nous est cependant pas interdit d'échanger des réflexions sur le sujet.

Je vous remercie également d'avoir souligné que la dotation de la Présidence de la République était désormais plus transparente et sa gestion assainie, que les objectifs sont bien atteints. J'ai bien noté cependant que vous estimez qu'ils ne seront pas tenables longtemps, mais ne soyons pas non plus trop pessimistes. Quant à la très légère hausse des frais de fonctionnement, de 100 000 euros, intégralement compensée par la baisse du poste « équipements et travaux », elle est avant tout liée à la hausse des frais de maintenance du matériel de téléphonie et à l'augmentation, décidée par La Poste, du coût des affranchissements.

Je ne m'arrêterai sur le budget de l'Assemblée nationale que pour souligner l'exemplarité de sa gestion, notamment grâce au contrôle attentif de la commission spéciale chargée de vérifier et d'apurer les comptes, sous l'égide du président Accoyer. Merci, plus généralement, de vos commentaires avisés sur le fonctionnement de l'Assemblée, notamment sur les relations avec les collaborateurs. Nos concitoyens ont le droit de savoir comment l'Assemblée nationale est gérée, et elle est bien gérée.

Certes, l'arrivée présumée d'un nouveau membre de droit au Conseil constitutionnel n'est pas budgétisée, mais la question est encore en débat – je ne me hasarderai pas sur ce terrain. Par ailleurs, le Conseil constitutionnel procédera à un certain nombre de dépenses liées aux échéances électorales et au recrutement de ressources pérennes pour traiter notamment les questions prioritaires de constitutionnalité, ce qui paraît indispensable.

Mme la rapporteure spéciale Marie-Christine Dalloz a souligné un certain nombre de points positifs, ce dont je la remercie, et, de manière parfaitement légitime, elle s'interroge sur d'autres. Je ne répondrai pas sur le fameux fichier. Le ministre de l'intérieur a l'intention de s'exprimer devant l'Assemblée nationale ; vous le recevrez d'ailleurs demain, mesdames et messieurs les députés, en commission. J'attache beaucoup d'importance à ce travail sur un sujet qu'il était légitime de soulever également pour sa dimension technique. Il est bon qu'un échange ait lieu, que toutes les questions précises soient posées, et que l'on ne s'en tienne pas à des déclarations d'intention, à des présupposés parfois bien éloignés de la réalité. J'attends donc beaucoup de cette audition, qui pourra répondre à un certain nombre d'interrogations.

Cette année, le législateur a étoffé les missions dévolues à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique. Il lui a ainsi confié la création et la gestion d'un répertoire des représentants d'intérêts et il a étendu l'obligation de remplir des déclarations d'intérêt et de patrimoine à environ 4 200 nouveaux déclarants. Cela constitue une hausse de 40 % d'une activité qui est le coeur de métier de la HATVP. Pour mener à bien ses missions, elle voit donc ses effectifs portés à cinquante ETP, soit seize recrutements en 2016 et 2017.

À ce jour, vous l'avez souligné, il n'existe aucune possibilité d'extension sur le site de la rue de Richelieu. Les agents recrutés depuis le mois de septembre dernier sont installés provisoirement dans deux salles de réunion, laissant une seule salle disponible pour les réunions du collège. La Haute Autorité est donc actuellement à la recherche de locaux dans Paris, avec les services du Premier ministre et France Domaine, afin de procéder à un déménagement au cours du premier semestre 2017, en respectant le plafond de loyer fixé par France Domaine, de 400 euros hors taxes et hors charges le mètre carré. Est recherchée une surface de 1 250 mètres carrés pouvant accueillir soixante-cinq postes de travail soit un ratio de 12,3 mètres carrés par agent – sait-on jamais, quelqu'un sera peut-être sensible à cette annonce immobilière que me voici en train de passer… Ces soixante-cinq postes de travail correspondent à un poste pour chacun des cinquante ETP, des quatre stagiaires et de l'apprenti, tous présents en permanence, et un ratio d'un pour quatre pour les rapporteurs et d'un pour trois pour les huit membres, qui ne sont pas présents en permanence. Des locaux occupés par le Laboratoire national de métrologie et d'essais, situés dans le 15e arrondissement, ont été visités, mais ils n'ont pas été retenus. De nouvelles visites sont prévues. Nous voilà donc parfaitement informés de la situation immobilière de cette institution.

Les dépenses des secrétariats d'État rattachés au Premier ministre s'élèvent en 2016, toutes dépenses comprises, dont les personnels mis à disposition, à 1,56 million d'euros pour mon cabinet, en baisse de 11 % par rapport à 2015 ; à 1,90 million d'euros pour le cabinet du secrétaire d'État chargé de la réforme de l'État et de la simplification, en hausse de 4 % par rapport à 2015 ; à 1,61 million d'euros pour le cabinet de la secrétaire d'État chargée de l'aide aux victimes ; à 1,18 million d'euros pour le cabinet du secrétariat d'État à l'égalité réelle, qui n'existe plus aujourd'hui. Les instructions du Premier ministre limitant le nombre de membres à dix par cabinet sont respectées par l'ensemble des cabinets. Vous avez effectivement remarqué la création et le « détricotage » d'un cabinet, mais n'oublions pas que le passage de quelques-uns de ses membres dans un autre cabinet ministériel peut contribuer à équilibrer les dépenses que vous avez envisagées.

Vous avez insisté sur la question de l'ETEC, qui a notamment pour mission d'assurer les déplacements aériens du Premier ministre. Je rappelle qu'il n'est possible de recourir aux vols de l'ETEC que dans le cadre de déplacements en lien avec les prérogatives ministérielles. Le Premier ministre a déjà eu l'occasion de s'exprimer devant les Français sur le déplacement que vous avez rappelé. Plus généralement, les déplacements de ce dernier étant, pour une grande part, tributaires de l'actualité politique, le montant de ces dépenses est très variable. À titre d'illustration, ces dépenses se sont élevées à presque 5 millions d'euros en 2011, 2,29 millions d'euros en 2014 et 3,78 millions d'euros en 2015. Pour l'exercice 2017 comme pour tous les autres, elles ne peuvent être définies a priori, et peuvent encore moins être fixées dans le « bleu » budgétaire. Elles seront couvertes, comme chaque année, par le dégel partiel de la réserve de précaution. Dans son relevé d'observations relatif à l'exécution budgétaire 2015, la Cour des comptes relève d'ailleurs que les réserves formulées sur la soutenabilité budgétaire de ces vols ont été levées : « les crédits sont apparus suffisants pour couvrir l'ensemble des dépenses et les risques potentiels des divers programmes sont identifiés et pris en compte ».

Je souhaite dire un mot de l'amendement du Gouvernement qui vous sera soumis en séance, la semaine prochaine, sur les crédits de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement. Afin de lui permettre de mener à bien ses missions dans un contexte de très forte sollicitation, son plafond d'emploi est porté, dans le PLF 2017, à 25 ETP. L'impact était estimé à 3 ETP supplémentaires sur l'année 2017, ce qui correspondait à une masse salariale globale de 2,12 millions d'euros. Toutefois, afin de permettre à la Commission de réaliser au plus tôt dans l'année les recrutements prévus, le Gouvernement vous proposera d'abonder sa dotation de 357 000 euros supplémentaires.

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