Intervention de Jean-Marc Todeschini

Réunion du 26 octobre 2016 à 9h30
Commission élargie : finances - défense nationale

Jean-Marc Todeschini, secrétaire d'état chargé des anciens combattants et de la mémoire :

À ceux d'entre vous qui ont parlé de budget électoraliste, je réponds qu'ils sont amnésiques. Avez-vous oublié les politiques que vous avez soutenues ? Les revendications de votre catalogue, que ne les avez-vous satisfaites au cours du quinquennat précédent ? L'expérience m'a prouvé qu'on a intérêt à rester raisonnable dans ses propos, surtout lorsqu'on est dans l'opposition !

La précédente majorité avait décidé onze points d'augmentation de la retraite du combattant entre 2007 et 2012. Sur ces onze points, nous en avons financé quatre, ceux qui sont entrés en vigueur au 1er juillet 2012. Avec les quatre points que j'ai décidés pour le budget 2017, les bilans sont plutôt équilibrés, même si deux points entreront en vigueur au mois de septembre.

À part des augmentations de points qui n'ont pas été financées en totalité, quelles décisions la majorité précédente a-t-elle prises ? Deux mesures en faveur des conjoints survivants de grands invalides de guerre ; nous en avons fait autant. Rien ou si peu pour les plus démunis – un demi-million d'euros – quand nous avons augmenté le budget d'aide sociale de plus de 6 millions d'euros en cinq ans, soit une augmentation de 31 % depuis 2012. Pas de revalorisation pour les harkis. Rien pour la quatrième génération du feu. Pas de carte OPEX. Pas de carte « à cheval ». Rien pour les prothèses de nouvelles générations.

Vous dites que le budget baisse de 67 millions d'euros. Certes, mais il aurait dû baisser beaucoup plus en tenant compte de la disparition des anciens combattants. Ainsi, ce budget permet de défendre le monde combattant et de répondre à d'autres sollicitations.

Vous dites également que, depuis 2012, les budgets cumulés ont baissé de plus de 500 millions d'euros. Or la majorité précédente, à l'occasion de la dernière loi de finances qu'elle ait votée, a diminué le budget des anciens combattants de 171 millions d'euros – en laissant quatre points d'augmentation à financer ! Sur la totalité du précédent quinquennat, de 2007 à 2012, les crédits ont baissé de plus de 650 millions d'euros. La majorité actuelle et le Gouvernement n'ont pas à rougir de la politique menée depuis 2012 au bénéfice du monde combattant.

La retraite du combattant est un avantage personnel versé au titulaire de la carte du combattant en témoignage de la reconnaissance nationale. On peut la toucher qu'à partir de soixante-cinq ans : elle s'ajoute à la pension militaire classique, est insaisissable, n'est assortie d'aucun droit à réversion. Plus de 1 million d'anciens combattants en bénéficient. Elle va augmenter de plus de 11 % pour un coût global de 748,5 millions d'euros, ce qui en fait le deuxième poste de dépenses de la mission « Anciens combattants », après les pensions militaires d'invalidité. Elle est déterminée par un nombre de points.

À partir de 2012, Kader Arif a fait un travail de fond au profit du monde combattant, avec le choix d'élargir le nombre de bénéficiaires de la carte du combattant. C'est ainsi qu'il a mis en place la carte « à cheval », ce qui a permis à 10 000 personnes de devenir bénéficiaires. Et ce n'était pas une année électorale ! De même, la carte OPEX, mise en place au 1er octobre 2015, a fait entrer 150 000 personnes au nombre des ressortissants de l'ONACVG. Une fois qu'on a étendu le nombre des bénéficiaires de la retraite du combattant, on a élargi le champ en prenant une mesure générale en faveur de toutes les générations du feu. La logique suivie était de régler d'abord les problèmes de justice sociale et d'équité, avant d'élargir. L'an passé, nous avons ainsi pris une mesure d'équité sur la campagne double.

Comment allons-nous atteindre ces 11 % de hausse ? Il y aura deux points supplémentaires au 1erjanvier, puis deux points au mois de septembre. Mais l'augmentation vient aussi de la hausse de 3 % du point PMI, lié au rapport constant. C'est aussi la conséquence, comme vous l'avez dit, de la hausse du point de la fonction publique de 0,6 % au 1er juillet 2016 ; elle ne se fait pas encore sentir, mais entrera en vigueur au 1er janvier. Cela fait augmenter le rapport constant.

N'oublions pas non plus la mise en place, à la demande du Président de la République, du protocole « parcours professionnels, carrière et rémunérations » (PPCR), qui revalorise les grilles indiciaires de la fonction publique. Cela fait augmenter le point PMI : porté à 14,13 euros au 1er janvier 2017, il sera automatiquement et régulièrement revalorisé au cours de l'année, grâce au rapport constant qui atteindra 14,46 euros au 1er octobre.

Monsieur Candelier, vous avez proposé la création d'une commission. Mais la hausse de 3 % du point PMI va affecter l'ensemble des mesures existantes, augmentant également le plafond de la rente mutualiste. Toutes ces revalorisations sont liées. Vous évoquez un nécessaire rattrapage. Mais l'inflation a été de 0,7 % sur la période de 2013 à 2015 et elle sera sans doute très faible sur la période 2016 à 2017. En comparaison, une hausse de 3 % du rapport constant et du point PMI apparaît comme un élément très favorable. La création d'une commission se justifiait à l'époque où le rapport constant n'évoluait pas suffisamment. Mais il est maintenant dynamique. Si je la mettais en place malgré tout, on la taxerait d'électoralisme. Pour l'heure, je me réjouis de la revalorisation, qui est considérable.

En ce qui concerne l'action sociale de l'ONACVG, une fragilité juridique affectait l'aide différentielle au conjoint survivant mise en place par l'ancienne majorité. Il fallait donc la remplacer, en fixant un seuil et un plafond. Le conseil d'administration de l'ONACVG l'a donc remplacé par une politique sociale dynamique et d'accompagnement personnalisé des veuves et des anciens combattants eux-mêmes. Sur les six premiers mois de l'année, 25 % des veuves ont touché plus que l'an passé. Vous observez des différences entre les départements. Certains ont simplement appliqué un versement proportionnel à celui de l'an passé, mais ils vont travailler et corriger. Les critères sont définis au niveau national. Certes, les demandes sont complexes à formuler, mais les anciens combattants et leurs familles bénéficient du soutien et de l'accompagnement des associations pour constituer leur dossier, qui fait l'objet d'un examen individuel. Les départements ne m'ont pas signalé de difficultés particulières.

Certes, on peut encore améliorer le dispositif. Nous n'en sommes qu'au septième mois d'application des nouvelles mesures. En élargissant l'aide aux plus démunis, nous n'avons pas abandonné les veuves. Nous serons bien sûr vigilants lors de l'établissement du bilan sur une année entière. Mais les crédits d'aide sociale ont largement augmenté.

Monsieur Juanico, vous m'interrogez sur les remarques que vous avez formulées dans votre rapport conjoint avec Marie-Christine Dalloz. L'harmonisation entre les différents départements est pilotée au niveau national, et il faut la regarder de près. Des consignes sont données. Mais vous évoquez aussi des disparités entre les services départementaux. Michel Vergnier a pourtant raison de souligner que le maillage territorial est préservé, car nous ne touchons pas à ce qui existe dans les départements ; j'en ai fait un cheval de bataille depuis mon entrée en fonctions. Si les situations sont assez disparates d'un département à l'autre, c'est lié aux dossiers et aux ayants droit. Certains départements bénéficient d'une assistante sociale, comme dans la Loire, où l'assistante a été immédiatement remplacée après son départ.

Mme Dalloz et M. Juanico proposent des mutualisations avec certains services, notamment ceux de la gendarmerie. Il faut y réfléchir, en effet, car nous avons peut-être à partager du personnel spécialisé, ce qui permettrait de travailler et d'aider un peu mieux.

En tout cas, les ayants droit doivent avoir accès à l'information. Les associations sont vigilantes. Il faut informer les veuves et les anciens combattants eux-mêmes, en les aidant à constituer leur dossier. J'ajouterai cependant que nous devons préserver leur anonymat.

Plusieurs d'entre vous ont évoqué l'effet des nouveaux dispositifs concernant les veuves. Je l'ai évoqué dans mon exposé liminaire : la réduction à cinq ans des soins apportés aux conjoints invalides n'est en vigueur que depuis le 1er juillet, et c'est pourquoi les chiffres que vous citez paraissent faibles. L'information doit par conséquent circuler. Et l'on ne saurait étendre l'aide aux veuves de façon systématique, car on ne les connaît pas – c'est pourquoi il est nécessaire qu'elles déposent un dossier. En tout cas, ce n'est pas parce que le nombre de bénéficiaires est faible qu'il faut douter du bien-fondé de la disposition, même s'il convient, certes, d'affiner les prévisions.

Nombreux sont les députés à être revenus sur l'octroi de la carte du combattant à ceux qui ont servi en AFN après 1962. Au moins mon prédécesseur a-t-il mis en place la « carte à cheval », dispositif qui vient d'entrer en vigueur. Vous ne l'aviez pas fait et vous réclamez tout, tout de suite, au Gouvernement ! Reste que l'extension du bénéfice de la carte du combattant pour après 1962 posera problème. Mais, j'y insiste, depuis 2012, nous avons avancé : tous ceux qui ont servi en AFN au moins un jour avant le 2 juillet 1962 peuvent obtenir la carte du combattant.

Vous avez par ailleurs évoqué l'abaissement de l'âge des bénéficiaires de la demi-part fiscale de soixante-quinze à soixante-quatorze ans – voté par la majorité actuelle contre l'avis du Gouvernement. Or un député du groupe Radical, républicain, démocrate et progressiste, a annoncé le dépôt d'un amendement visant à abaisser encore cette limite d'âge. Je rappelle que cette mesure est liée au droit à réparation de l'ancien combattant ; aussi sa veuve ne peut-elle en bénéficier que si lui-même, auparavant, en avait bénéficié. Le rapport Marini, toujours dans un tiroir, pourrait ressortir un jour…

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