Intervention de Éric Ciotti

Séance en hémicycle du 12 octobre 2016 à 15h00
Statut des magistrats et conseil supérieur de la magistrature - modernisation de la justice du xxie siècle — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Ciotti :

Dans le contexte actuel, où des mineurs de seize ans révolus ont commis des assassinats terroristes, crimes punis d’une peine de réclusion criminelle à perpétuité, il ne paraît pas souhaitable d’interdire la possibilité de prononcer une telle sanction d’ores et déjà très encadrée. C’est une erreur, c’est même une faute, au moment même où l’actualité récente a démontré l’implication de plus en plus fréquente dans des procédures d’association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste de mineurs de plus en plus nombreux – cela nous a été confirmé lors des auditions auxquelles j’ai procédé dans le cadre de la proposition de loi renforçant la lutte contre le terrorisme, que défendra demain le groupe Les Républicains. C’est un fait nouveau, que vous connaissez. Or vous choisissez précisément ce moment pour baisser encore davantage la garde.

Monsieur le ministre, ce texte vous offrait, plus généralement, l’occasion de corriger certaines des fautes ou des errances de votre prédécesseur. Vous ne l’avez pas souhaité : nous le regrettons.

Le projet de loi ne s’attaque pas, notamment, à la question centrale de l’exécution des peines. Beccaria disait : « Les peines doivent être certaines et promptes. La certitude d’une peine, même modérée, fera toujours plus d’impression que la peur d’une autre, même plus terrible, mais qui serait souvent inappliquée ». Or aujourd’hui, vous le savez, beaucoup de peines ne sont pas exécutées.

Vous avez cité le chiffre de 86 000 peines de prison ferme exécutoires non exécutées ou en attente d’exécution. Ne s’agirait-il pas plutôt de 100 000 ? Comment savoir, puisqu’il n’existe pas de statistiques et que vous ne répondez pas aux questions qu’on vous pose sur le sujet. C’est le flou le plus total, qui vise à masquer la réalité d’une situation que nous savons très grave. Or les condamnations sont trop souvent, voire de façon quasi automatique, déconstruites, non seulement par l’aménagement de la peine, auquel vous attachez la vertu de prévenir la récidive mais qui est simplement devenu une variable matérielle d’ajustement de la surpopulation carcérale, mais aussi par l’inexécution de la peine, que je viens d’évoquer, et par la réduction de la peine. Ce sont autant de subterfuges pour faire baisser la pression dans les établissements pénitentiaires.

Cette situation, vous le savez, engendre une profonde incompréhension et un dangereux sentiment de défiance envers notre justice parce que nos concitoyens ne peuvent ni comprendre ni tolérer que les sanctions prononcées ne soient, en réalité, jamais exécutées.

Monsieur le ministre, c’est un message d’impunité totalement irresponsable qui est ainsi envoyé aux délinquants. Toutes nos propositions destinées à rendre plus effective l’exécution des peines en limitant les réductions et les aménagements et en renforçant la collégialité des décisions d’aménagement ont été balayées d’un revers de la main. Nous le déplorons et le condamnons.

Parallèlement, monsieur le Premier ministre et vous-même avez annoncé, à grand renfort de communication, un plan de lutte contre la surpopulation carcérale reposant sur la création de 10 000 à 16 000 nouvelles cellules – nous en reparlerons peut-être lors de l’examen du projet de loi de finances. Ce revirement est salutaire, même s’il est surprenant,…

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