Intervention de Valérie Rabault

Réunion du 20 septembre 2016 à 15h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaValérie Rabault, rapporteure générale :

Venons-en au cas d'un célibataire qui perçoit 1 700 euros nets par mois en salaire, qui bénéficie de 500 euros de crédit d'impôt, et dont les revenus fonciers mensuels s'élèvent à 600 euros. Aujourd'hui, il paie 1 720 euros au titre de l'impôt sur le revenu par an, soit par tiers, soit par mensualités. Avec la réforme, il paiera 2 220 euros d'impôts sur le revenu par an, soit 137 euros retenus mensuellement à la source. Il devra régler un acompte de 48 euros par mois sur les revenus fonciers au titre de l'impôt sur le revenu, et il sera remboursé de 500 euros en septembre de l'année N + 1.

Un couple dont le conjoint 1 perçoit un salaire de 1 500 euros nets et le conjoint 2 6 000 euros nets paie aujourd'hui 13 000 euros d'impôts sur le revenu par an. Avec la réforme, trois taux peuvent jouer.

Si le prélèvement à la source s'opère avec le taux de droit commun, le membre 1 sera prélevé chaque mois de 217 euros et son salaire net s'élèvera à 1 283 euros, le membre 2 de 867 euros, ce qui ramènera son salaire net à 5 133 euros. Le prélèvement total annuel reste de 13 000 euros.

Si ce couple opte pour un taux par défaut, 16 200 euros d'impôt seront prélevés sur l'année et 3 200 euros seront remboursés en année N + 1. Un taux par défaut de 4 % s'appliquera au premier membre du couple qui se verra prélevé de 60 euros par mois – son salaire net mensuel s'élèvera à 1 440 euros –, et un taux de 21,5 % s'appliquera au second membre, qui sera prélevé de 1 290 euros par mois – son salaire net s'élèvera alors à 4 710 euros.

En cas de taux individualisé défini par le couple, 13 000 euros au total seront prélevés sur l'année, un membre du couple étant prélevé de 36 euros par mois alors que l'autre le sera de 1 048 euros.

Imaginons que ce même couple bénéficie d'un crédit d'impôt de 2 000 euros, par exemple parce qu'il emploie une nounou. Aujourd'hui, il paie 11 000 euros d'impôts sur le revenu par an. Si le prélèvement à la source s'opère avec le taux de droit commun, le premier membre sera prélevé de 217 euros par mois, le second membre sera prélevé de 867 euros mensuellement, soit un prélèvement total annuel de 13 000 euros. Le couple sera remboursé de 2 000 euros en année N + 1. Si le couple choisit le taux par défaut, très désavantageux pour eux en termes de trésorerie, il sera prélevé au total de 16 200 euros puis remboursé de 5 200 euros en année N + 1, soit 2 000 euros de crédit d'impôt, auxquels s'ajouteront 3 200 euros d'un « trop-perçu » découlant du taux par défaut. Si, en revanche, les conjoints demandent le taux individualisé, ils seront prélevés de 13 000 euros et remboursé de 2 000 euros en année N + 1.

Le même couple avec deux enfants, sans crédit d'impôt, paierait aujourd'hui 9 991 euros, sous l'effet de la « conjugalisation » et la « familialisation », autrement dit le quotient familial. Si l'on applique le taux de droit commun, le prélèvement total annuel effectué sur leurs salaires reste de 9 991 euros. Le prélèvement à la source avec le taux par défaut amène à prélever sur les deux salaires 16 200 euros, mais le couple sera remboursé en année N + 1 de 6 209 euros. Avec le taux individualisé, ils seront prélevés exactement de ce qu'ils doivent au Trésor public.

Prenons un dernier exemple : celui de ce même couple avec ses deux enfants qui, cette fois, bénéficie d'un crédit d'impôt d'un montant de 2 000 euros. Aujourd'hui, il ne paie que 7 991 euros d'impôt sur le revenu. Avec la réforme, et l'application du taux de droit commun, il paiera 9 991 euros, mais obtiendra un remboursement de 2 000 euros en année N + 1. La mise en oeuvre du taux par défaut se traduirait par un « trop-perçu » remboursé en année N + 1, en plus du remboursement du crédit d'impôt. Avec le taux individualisé, le couple est prélevé de ce qu'il doit exactement, mais le crédit d'impôt continue d'être remboursé l'année suivante.

J'en viens à la question de « l'année blanche ». L'impôt sur le revenu acquitté en 2018 portera sur les revenus perçus en 2018, alors qu'avec le système actuel il aurait porté sur les revenus perçus au titre de l'année 2017 ; en revanche, les revenus exceptionnels perçus en 2017 seront taxés en 2018. J'estime en conséquence que l'expression « année blanche » n'est pas totalement pertinente car elle laisse entendre que l'impôt ne serait pas payé, ce qui est faux.

Je précise que les réductions et les crédits d'impôt au titre des revenus de 2017 seront maintenus et versés en 2018. Si vous changez votre chaudière en 2017, vous bénéficierez du crédit d'impôt pour la transition énergétique en 2018 ; si vous faites un don pour une campagne électorale en 2017, vous bénéficierez des réductions d'impôts prévues en 2018… Il en va de même pour la réduction d'impôt afférente à l'emploi d'un salarié à domicile.

Un contribuable peut-il se voir prélever de l'impôt sur le revenu alors qu'il n'est pas imposable ? Cela peut se produire du fait du taux choisi et de la non-prise en compte des crédits et réductions d'impôt, mais le contribuable sera de toute façon remboursé en année N + 1. Le taux par défaut peut conduire à une « surimposition » temporaire de certains contribuables, cependant il ne s'agit que d'un décalage, ils seront toujours remboursés l'année suivante.

Comment gérer la situation d'un contribuable qui aurait à la fois un acompte et une retenue à la source ? Les deux s'ajoutent de manière analytique.

Un contribuable peut-il modifier à la baisse le taux qui lui est appliqué ? Ce sera possible, mais il devra prendre garde à ne pas déclarer un revenu trop inférieur à la réalité car des sanctions sont prévues en cas de modulation irrégulière – la bonne foi est néanmoins prise en compte.

Enfin, un contribuable peut-il refuser de voir son impôt prélevé par son employeur ? La réponse est non.

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