Intervention de Marc Laffineur

Réunion du 19 juillet 2016 à 15h00
Commission des affaires européennes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarc Laffineur, co-rapporteur :

Revenons, à présent, sur les grandes tendances par rubrique. On constate, en premier lieu, une augmentation globale de la rubrique 1 (« Croissance intelligente et inclusive ») qui masque toutefois une évolution contrastée de ses deux sous-rubriques. De manière générale, le projet de budget pour 2017 prévoit une hausse de 6,9 % des crédits d'engagement de la rubrique 1 dans son ensemble par rapport au budget 2016 ; ce qui correspond à un montant total de 74,6 milliards d'euros et de 56,6 milliards d'euros en paiement (- 14,5 % par rapport à 2016). Plus particulièrement, 21,1 milliards d'euros pour la rubrique 1a (« Compétitivité pour la croissance et l'emploi »), soit une hausse de 11 % par rapport à l'année 2016 résultant, en grande partie, des fonds alloués au FEIS, au MIE et au programme « Erasmus + ». En effet, sur cette enveloppe, 10,6 millions d'euros sont consacrés à la recherche et l'innovation dans le cadre du programme Horizon 2020 ; 2 milliards d'euros en faveur de l'éducation à travers le programme « Erasmus + » ; 2,5 milliards d'euros en faveur du mécanisme pour l'interconnexion en Europe et 299 millions d'euros en faveur des petites et moyennes entreprises dans le cadre du programme COSME. 2,66 milliards d'euros sont consacrés au FEIS dans le cadre du Plan Juncker et 53,57 milliards d'euros pour le soutien aux investissements productifs et aux réformes structurelles par l'intermédiaire des Fonds structurels et d'investissement européens.

L'analyse de la rubrique 1 appelle au moins deux remarques. Tout d'abord, on constate, de manière générale, une diminution substantielle ( - 23,5 %) des crédits de paiement de la sous-rubrique 1b relative à la cohésion économique, sociale et territoriale, qui résulte notamment du moindre besoin de crédits pour les programmes correspondant à la période de programmation 2007-2013 ainsi que des retards pris dans la mise en oeuvre des programmes de la nouvelle période de programmation 2014-2020. Ensuite, il convient de noter que l'initiative en faveur de l'emploi des jeunes ne fait pas l'objet d'une programmation supplémentaire dans le projet de budget pour 2017 : les crédits de paiement sont maintenus mais ne connaissent pas d'augmentation et nous regrettons qu'aucun effort supplémentaire ne soit fait dans ce cadre-là.

En second lieu, on constate une progression limitée de la rubrique 2 (« Croissance durable : ressources naturelles »). Les crédits d'engagement de la rubrique 2 s'élèvent à 58,9 milliards d'euros. Si l'on ne prend pas en compte l'effet lié à la reprogrammation des crédits d'engagement pour 2014 pour le développement rural, cela correspond à une augmentation de 1,3 % par rapport au budget 2016. Le niveau de dépenses s'établit ainsi à 1,3 milliard d'euros sous le plafond de la programmation pluriannuelle. La Commission européenne propose, par conséquent, d'utiliser 650 millions d'euros de cette marge pour compenser l'utilisation de la marge pour imprévus au profit des actions de la rubrique 3 consacrées aux migrations et aux réfugiés. L'enveloppe proposée pour l'aide aux agriculteurs européens - via le Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) et les soutiens relevant des interventions sur les marchés agricoles et des paiements directs - est, par ailleurs, de 42,9 milliards d'euros.

En troisième lieu, on relève un renforcement très important des crédits de la rubrique 3 pour gérer les frontières extérieures de l'Union européenne et relever les défis liés à la crise des réfugiés, à l'intérieur comme à l'extérieur de l'Union européenne. La rubrique 3 (« Sécurité et citoyenneté »), fait l'objet d'une augmentation notable des crédits d'engagement (+ 5,4 % par rapport à 2016). Comme l'année précédente, la programmation des crédits correspondant à cette rubrique dépasse, compte tenu de l'actualité, la programmation initiale figurant dans le cadre financier pluriannuel. La hausse des crédits alloués à la rubrique 3, grâce à la mobilisation de l'instrument de flexibilité et de la marge pour imprévus illustre la priorité donnée en 2017 à la gestion des défis posés par la crise migratoire et les menaces sécuritaires. La mobilisation maximale des outils de flexibilité ne laisse, au total, aucune marge disponible pour cette rubrique. Les crédits de paiement s'établissent, pour leur part, à 3,7 milliards d'euros et enregistrent ainsi une hausse de 25,1 % par rapport à 2016, résultat de l'augmentation des crédits d'engagement pour les années 2016 et 2017.

De manière générale, le projet de budget pour 2017 prévoit de consacrer environ 3 milliards d'euros au financement d'actions à l'intérieur de l'Union européenne parmi lesquelles la mise en place du corps européen de garde-frontières et de garde-côtes ; d'un nouveau système d'enregistrement des entrées et des sorties visant à renforcer la gestion des frontières ; la révision du régime d'asile européen commun et la mise en place d'une Agence de l'Union européenne pour l'asile.

L'action de l'Union européenne en matière de sécurité et de gestion de la crise des réfugiés relève également de la rubrique 4. On constate, en quatrième lieu, une hausse des moyens consacrés aux actions extérieures de l'Union européenne en grande partie imputable à la dimension externe de la gestion de la crise des réfugiés. Pour la rubrique 4, « L'Europe dans le monde », la Commission européenne propose 9,4 milliards d'euros de crédits d'engagement ; ce qui correspond à une augmentation de 2,9 % par rapport à l'année 2016 et ne laisse aucune marge disponible sous plafond. Cette hausse vise notamment à financer la dimension externe de la gestion de la crise des réfugiés, en particulier s'agissant des engagements pris par l'Union européenne à l'égard de certains pays voisins à l'instar de la Turquie, de la Jordanie et du Liban. Les crédits de paiement s'établissent, pour leur part, à 9,2 milliards d'euros, enregistrant une baisse de 8,5 % par rapport à 2016. Au total, le projet de budget pour 2017 propose de mobiliser 2,2 milliards d'euros à des actions à l'extérieur de l'Union européenne et de consacrer 750 millions d'euros à la Facilité en faveur des réfugiés en Turquie et 525 millions d'euros pour répondre aux engagements pris par l'Union européenne, lors de la Conférence des Nations Unies qui s'est tenue à Londres en février dernier, en faveur du Liban et de la Jordanie.

Enfin, on constate, en cinquième et dernier lieu, une progression contenue des dépenses de la rubrique 5 (« Administration »). Pour cette dernière, les crédits d'engagement et de paiement augmentent, pour l'ensemble des institutions européennes, de 4,1 %. La Commission européenne propose de consacrer 514,4 des 596,3 millions d'euros de marge sous plafond de la rubrique 5 pour compenser l'utilisation de la marge pour imprévus au profit des dépenses de la rubrique 3. Le projet de budget pour 2017 prévoit, conformément à l'accord interinstitutionnel du 2 décembre 2013, une réduction des dépenses de personnel. En 2017, avec une réduction de 239 postes, la Commission européenne aura atteint son objectif de diminution de 5 % de ses effectifs sur la période 2013-2017, tandis que les autres institutions procèderont à une réduction de 1 % de leur personnel. Toutefois, en dépit de ce mouvement baissier, les dépenses administratives demeurent globalement en augmentation et sont principalement tirées par le nombre croissant de départ à la retraite (+3,5 %). Par ailleurs, la nécessité de renforcer la sécurité, l'ajout d'une nouvelle langue officielle de l'Union européenne (l'irlandais) et l'ajustement des crédits pour prendre en compte la réévaluation des salaires et des pensions à la fin de l'année 2015 - qui n'ont été que partiellement intégrés dans le budget pour l'année 2016 - constituent des charges supplémentaires pour le projet de budget pour 2017.

En conclusion, le projet de budget pour 2017 se fait, logiquement, le reflet des priorités de l'Union européenne et traduit la plupart des engagements pris par les chefs d'État et de gouvernement en matière de sécurité et de gestion de la crise migratoire. Ce projet, établi dans le cadre de la programmation pluriannuelle, s'apparente ainsi à une équation sans inconnues mais non sans difficultés.

Si nous souscrivons à l'économie générale du budget et à ses principales orientations, nous soulignons que sa faiblesse demeure sans doute encore le principal handicap à la réalisation de politiques particulièrement ambitieuses. Représentant 1 % du PNB et 2 % des dépenses publiques de l'Union européenne, le budget de l'Union européenne constitue, de façon évidente, la principale limite à toute action d'envergure de l'Union européenne. Par ailleurs, dans un contexte où la plupart des États membres mènent encore des politiques de consolidation budgétaire, il semble difficile d'envisager une hausse des contributions nationales. Cette question mériterait toutefois sans doute d'être discutée dans le cadre de la révision à mi-parcours du cadre financier pluriannuel.

Par ailleurs, il conviendra de demeurer vigilant quant à la poursuite des négociations sur ce projet de budget. Il est, en effet, probable que le Parlement européen et les États membres proposent, comme c'est souvent le cas, des amendements peu compatibles entre eux à ce texte initial.

De manière générale, nous souhaitons insister sur la démarche de rationalisation et de simplification entreprise par la Commission européenne dans le cadre de l'initiative BFOR (« A Budget Focused On Results »). Le principal objectif de la Commission européenne est de développer une approche axée sur les résultats des actions et programmes financés, dans un contexte où les ressources sont à la fois de plus en plus recherchées et de plus en plus rares. Cette démarche, à l'oeuvre dans le projet de budget pour 2017, nous semble devoir être encouragée.

J'aimerais également donner un sentiment plus personnel et indiqué que je pense que le projet de budget pour 2017 n'a pas suffisamment pris en compte des problématiques agricoles qui ne manqueront pas de resurgir très prochainement.

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